Je dirige un fan club Harry
    Potter. Le local est plein à craquer de
  livres Harry Potter, de cassettes Harry Potter, de jeux vidéos Harry
  Potter, de baguettes magiques, de Chocogrenouilles, de manuels de Qidditch,
  de recueils de sortilèges, de hiboux et de capes de sorciers. Les enfants
  passent toute la nuit à lire et restent dans leurs chambres pendant
  la journée à écouter les histoires sur cassettes. S’ils
  sont contraints de quitter leurs chambres, ils se déplacent comme des
  zombies, les écouteurs aux oreilles pour vaquer à la moindre
  tâche. Les conversations tournent autour du sortilège le plus
  approprié en telle circonstance et de comment Nick Quasi-Sans-Tête
  a presque eu la tête tranchée. Avec la plupart de mes fans, vous
  pourriez commencer n’importe quel paragraphe de l’un des cinq livres
  et ils pourront le terminer à votre place.
C’est vrai, je l’admets. Il s’agit de ma maison et ces enfants
  sont…….les miens, également. Nous n’avons peut-être
  pas de hibou, mais mes enfants sont vraiment capables de réciter plusieurs
  paragraphes d’affilée.
Les profs étaient « stupides », les cours d’enseignement religieux étaient « à côté de la plaque » et il ne retournerait pas à l’école.
Un jour, mon garçon de 12 ans, celui qui est le plus accro, est revenu
  de l’école juive, en déclarant que ça y est, il
  en avait assez. L’école n’était pas pour lui. Les
  profs étaient « stupides », les cours d’enseignement
  religieux étaient « à côté de la plaque » et
  il ne retournerait pas à l’école.
Ce n’était pas la première fois que nous entendions cette
  rengaine au sujet de son école et il éprouvait , déjà depuis
  un certain temps, ce genre de sentiments envers le judaïsme. Il y a quelques
  années, alors qu’il avait neuf ans, il m’avait reproché de
  m’être convertie au judaïsme. Je le bordais un soir dans son
  lit, quand il me dit : « Pourquoi t’es tu convertie ?! Je me sens
  presque en prison. Tu aurais dû attendre que nous soyons nés,
  pour que nous puissions tous choisir par nous-mêmes ! » Depuis,
  il maintient les apparences d’une vie juive, mais il nous fait savoir
  régulièrement que c’était notre choix, pas le sien.
Auparavant, quand notre
    fils avait besoin de faire un break de l’école,
  il s’arrangeait pour se faire suspendre des cours pendant quelques jours.
  Ce jour était la première fois où il nous faisait part
  de son sentiment sans être précédé par le coup de
  téléphone du directeur, nous avons donc décidé de
  lui offrir un arrêt préventif.
Une semaine plus tard,
    il était bien reposé, complètement
  absorbé par ses livres mais pas plus disposé à reprendre
  l’école. Nous avons parlé avec lui, nous l’avons écouté,
  cajolé, embrassé. Mais retourner à l’école
  n’était pas dans ses intentions. Nous avons eu une entrevue avec
  le directeur et avons écouté notre fils expliquer les raisons
  de son refus d’une éducation juive et pourquoi nous gaspillions
  tous notre temps, nos efforts et notre argent avec lui. 
Le directeur a suggéré que l’environnement scolaire ne
  lui était peut-être pas adapté, puis nous sommes partis,
  incertains quant à la marche à suivre. Nous avons reçu
  de nombreux conseils et envisagé plusieurs solutions : des cours à domicile,
  des cours par Internet, l’école publique du quartier (où il
  serait le seul juif d’une école de la ville de mauvais niveau)
  et d’autres écoles privées. Nous nous sommes renseignés
  sur un collège privé destiné aux enfants démotivés,
  sur une autre école juive et sur l’école privée
  Montessori. Cela faisait à présent six semaines que notre fils
  ne s’était pas assis derrière les bancs de l’école
  et la méthode Montessori semblait prometteuse. Pourtant, un mois après
  son inscription, ses professeurs et lui s’accordaient pour dire que ce
  nouvel environnement ne lui convenait pas. 
Retour à la case départ. Il passait ses journées avec
  moi au travail ou bien restait à la maison. Il devint un expert du système
  de bus municipal et apprit comment faire une pizza à partir de rien.
  Il passait beaucoup plus de temps avec ses parents et attendait avec impatience
  le retour de ses frères et sœurs de l’école. Il se
  rendait régulièrement à la bibliothèque et commença à étendre
  ses lectures au-delà de l’univers de Harry Potter et des bandes
  dessinées. Nous entretenions de longues conversations au sujet des nouvelles
  idées qu’il avait découverts, lui donnant l’amour
  et la place dont il avait besoin, mais il n’était toujours pas
  prêt à retourner à son ancienne école, et jusque
  là, nous n’avions toujours pas trouvé d’alternative
  valable.
L’école publique locale, qui était prête à accepter
  un enfant démotivé, fonctionnait par ailleurs sur un mode disciplinaire
  très strict, avec un policier parmi le personnel, une suspension interne
  des cours et un programme de traitement anti-drogue pour les 6-5-4ème
  ! Une autre école, allant du collège au lycée, offrait
  un programme particulièrement novateur, avec quantité d’apprentissage
  parallèle, d’excursions dans la nature et même de voyages à l’étranger…mais
  ils ont d’emblée reconnu leur difficulté à faire
  face au problème de la drogue. D’ailleurs, quelqu’un offrit
  de la marijuana à notre fils dès le jour où il accompagna
  un autre élève pour avoir un aperçu de la vie dans l’établissement.
  Il vit également des élèves avec de nombreux piercings
  sur le corps et découvrit que le collège avait aménagé des
  endroits pour que les élèves puissent fumer pendant la pause.
Ces expériences lui permirent de prendre conscience qu’il existait
  certaines différences entre ce qui se trouvait « au dehors » et
  ce que nous nous efforcions de lui offrir. Il a admis que ce type d’établissements
  n’était pas pour lui, mais….qu’un collier en cuir
  nickelé avait l’air plutôt cool. J’ai refusé tout
  net l’idée du collier, mais cela nous a donné l’occasion
  de parler de la manière dont les gens s’habillent, en signe d’appartenance à un
  certain groupe, et du fait que les gens modifient leur apparence pour avoir
  l’air original. C’était l’occasion parfaite pour me
  lancer dans l’un de mes petits discours, en lui expliquant à quel
  point il est spécial, parce qu’il fait partie d’un peuple
  spécial, chargé d’une mission spéciale.
Il me jeta un de ses regards « C’est ce que tu penses »,
  mais j’ai prié en silence, espérant que mon message fasse
  son effet malgré tout.
Les juifs tout comme Harry, vivent dans une dimension parallèle à ce monde.
Un jour, il était avec moi dans la voiture alors que j’écoutais
  une cassette traitant de la vision du judaïsme sur les sciences occultes.
  D’ordinaire, je ne le torture pas avec mes cassettes de cours, mais cette
  fois, il était avec moi pendant mon temps-libre et j’avais envie
  d’écouter. Sur la cassette, Rav Mordechai Becher comparait le
  monde de Harry Potter à celui des juifs. Il expliqua que les juifs tout
  comme Harry, vivent dans une dimension parallèle à ce monde.
  Mon fils prêta soudainement attention. Il écouta pendant un certain
  temps, puis me posa quelques questions. J’éteignis alors la cassette
  pour que nous puissions approfondir l’idée ensemble :
Nous vivons dans le même monde que les autres, mais nous menons des
  vies relativement différentes. Les juifs ont leur propre univers secret
  de pratiques et de rituels. Nous mettons des tefilines, mangeons de la nourriture
  kasher, portons des noms hébraïques, et nous étudions et
  prions dans une langue ancienne et mystique. Nous passons un septième
  de notre vie (le Chabbat) à nous réfréner de toute influence
  créatrice sur le monde, temps durant lequel nous recevons une âme
  supplémentaire. 
Nous sommes pareils aux
    autres, mais avons une mission propre qui requiert des responsabilités particulières. Les juifs sont chargés
  d’enseigner la moralité à l’humanité. Notre
  tâche est de révéler la présence de D.ieu sur terre,
  en accomplissant nos tâches quotidiennes et en ayant conscience de leur
  dimension spirituelle.
Nous avons reçu 613 sentiers pour nous aider à accomplir
    cette mission. 
  Ces mitsvot nous donnent accès à une « magie » spirituelle
  qui : 
  a) nous aide à réaliser notre potentiel (grâce aux commandements
  positifs), 
  b) nous empêche de subvertir notre énergie et de nous diminuer
  (en nous réfrénant de transgresser les prohibitions). 
Les juifs ont leur propre « Chemin de Traverse ». Nous avons parlé de
  Central Avenue à Cedarhurst, où nous avions fait des courses
  au cours d’un séjour à New York. La rue entière
  est pleine de boutiques destinées aux juifs : restaurants kashers, librairies
  juives, épiceries kashers, magasins de vêtements vendant kippot
  et tsitsit, magasins d’argenterie avec des chandeliers et des verres
  de kiddoush. (La plupart des new-yorkais non-juifs ne savent même pas
  que cette rue existe.)
Mon fils resta assis en
    silence pendant quelques minutes, perdu dans ses pensées.
  Puis, il se tourna vers moi et m’offrit un commentaire qui valait bien
  chaque jour passé hors de l’école : 
« 
  Alors, c’est comme …si j’étais un sorcier….élevé dans
  une famille de sorciers. Et que je voulais aller dans une école de Moldus
  ? »
Un autre instant de silence.
« Je pense que je suis prêt pour une éducation
juive. »
Je ne pouvais pas en croire
    mes oreilles. Il avait finalement compris. Avec l’aide de D.ieu, la patience, l’amour et le temps que nous lui
  avions consacré, avaient porté leurs fruits. Quand nous sommes
  arrivés à la maison, il a appelé son professeur pour voir
  s’il pouvait reprendre les cours.
La magie de Harry a aidé notre fils à réaliser qu’il
  a sa propre particularité cachée, une particularité qui
  implique l’appartenance à un groupe unique, menant une vie qui
  lui est propre. Après avoir vu ce que lui offraient les autres écoles,
  il a été capable de voir sous un autre jour ce qui se trouvait
  de son côté de la barrière. Tout à coup, mon fils
  a compris que pour intégrer parfaitement son individualité, il
  devait la comprendre pleinement. Et pour y parvenir, il lui était nécessaire
  de suivre son propre Poudlard.
Traduction et adaptation
    de Tsiporah Trom