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Une découverte surprenante à SyracuseUne visite de l'un des plus anciens Mikvés d'Europe.

Au cours d’une récente émission de télévision consacrée à la Sicile, un des sujets traités concernait la découverte faite en 1999 d’un des plus anciens mikvé d’Europe dans la petite ville de Syracuse. Je devais me rendre en Sicile peu de temps après et je n’ai pas eu trop de difficulté à découvrir cet endroit réellement surprenant.

Ce mikvé se trouve à Ortygia, une étroite presqu'île qui constitue la partie la plus ancienne de Syracuse, dans ce qui fut jusqu’il y a environ cinq cents ans le quartier juif de la ville, et qui en a d’ailleurs conservé le nom : la Giudecca. La découverte de ce mikvé est dûe à la curiosité et à l’obstination d’une femme, Amalia Daniele, dont la famille est l’une des plus anciennes de Syracuse.

Il y a environ 17 ans, Mme Daniele fit l’acquisition d’un ancien palais, la Casa Bianca, dont elle entreprit la restauration pour le transformer en un hôtel de charme, situé au 52 via Alagona, et qui, en raison de sa situation dans l’ancien quartier juif s’appelle « Alla Giudecca ».


Les travaux de rénovation étaient pratiquement terminés lorsque l’attention de Mme Daniele fut attirée par une fenêtre qui donnait sur une petite cour dans laquelle ne débouchait aucun accès.

Intriguée par cette anomalie elle eut l'intuition que cette fenêtre n'était en fait que la partie supérieure d'une porte qui aurait été murée. Elle demanda alors aux ouvriers de dégager le mur sous cette fenêtre et elle put vérifier que son intuition ne l'avait pas trompée. Il s’agissait bien d’une porte dont la partie basse avait été murée.

Sa curiosité étant piquée elle voulut savoir où menait cette porte.

Madame Daniele s'engagea alors dans une longue et couteûse entreprise de déblaiement qui porta ses fruits. Les ouvriers mirent au jour les premières marches d’un escalier creusé dans le roc. Dix ans plus tard et après avoir évacué 156 camions de gravats, un escalier de 56 marches était dégagé conduisant à une salle voûtée d’environ 6 mètres sur 6 supporté par quatre piliers massifs, située à 18 mètres au-dessous du niveau du sol.

Cette découverte était déjà intéressante, mais le plus surprenant restait encore à venir.

Dans le sol de cette salle voûtée étaient creusés trois bassins d’un mètre cinquante de profondeur et se trouvant à 90 degrés les uns des autres, un peu comme les feuilles d’un trèfle. Des marches permettant d'en atteindre le fond étaient creusées dans chacun des bassins .



Par ailleurs, de part et d’autre de la salle, deux couloirs menaient à deux autre bassins individuels où des marches identiques étaient creusées.



Ces bassins étaient alimentés par une source d'eau pure surgissant d'une fissure dans la roche.

On peut imaginer la perplexité de Mme Daniele : à quoi pouvaient bien servir ces bassins ?

Aucune hypothèse n’étant satisfaisante, elle se souvint que son palazzo se trouvait dans l’ancien quartier juif d’Ortygia et demanda alors conseil à des personnalités juives italiennes qui n’eurent aucune hésitation : il s’agissait d’un très ancien mikvé alimenté par une des nombreuses sources que l’on trouve à Ortygia.

C’est ce qu’ont confirmé les spécialistes réunis en Décembre 1999 par Mme Daniele pour un colloque qui s’est tenu dans une salle de conférence située juste au-dessus du mikve.

Parmi les participants se trouvaient David Cassuto, professeur d’architecture à l’Université Hébraïque de Jérusalem, Amos Luzzato, président de l’union des Communautés juives d’Italie, le rabbin Benedetto Carucci Viterbi, professeur au Collège Rabbinique de Rome, Antonella Mazzamuto, professeur d’architecture antique et médiévale de l’Université de Palerme, et bien entendu, Amalia Daniele, présidente de l’Association Culturelle "Syracuse IIIème Millénaire".

La datation du mikve n’a pas encore été établie avec certitude.

L’hypothèse la plus vraisemblable ferait remonter sa construction à l’époque byzantine (6ème ou 7ème siècle). On pense que la présence juive en Sicile date du 1er siècle, c’est-à-dire après la destruction du second Temple. Mais la première preuve fiable permettant de l’attester est l’épitaphe en latin, trouvée à Catane, sur la pierre tombale d’Aurélius Samohil et de son épouse décédée dans cette île, en l'an 383 à l’âge de 23 ans.

Les Juifs ont vécu plus d’un millénaire en Sicile. La vie juive y a pris fin en 1492 lorsque les rois catholiques, Ferdinand et Isabelle ont signé le décret d’expulsion qui s’appliquait aux Juifs d’Espagne et à tous ceux résidant dans les territoires se trouvant sous domination espagnole, ce qui était le cas de la Sicile.

Face au décret d’expulsion, les Juifs pouvaient soit s’exiler, soit se convertir.

Certains choisirent cette dernière solution, ce qui leur permettait de rester sur place et de conserver leurs biens. Aujourd’hui, il n’y a plus, officiellement, de Juifs en Sicile, mais on trouve encore de nombreux patronymes correspondant à ceux des Juifs convertis. Quant à la majorité des Juifs qui choisirent l’exil, beaucoup pensaient que celui-ci serait de courte durée et qu’ils pourraient revenir et retrouver leurs maisons.

On suppose donc que ce mikve a été muré pour ne pas être utilisé à d’autres fins que celles de bain rituel.

Les participants au colloque ont également émis l’hypothèse que le mikve devait se trouver tout près de la synagogue de Syracuse qu’ils situent à l’emplacement actuel de l’église San
Giovanni Battista. Amalia Daniele nous a conduits à cette église toute proche, aujourd’hui en ruines, pour nous montrer, sur un des murs, une pierre portant des inscriptions en hébreu. Cette pierre est, d’ailleurs, posée à l’envers, ce qui en rend la lecture difficile ! Ceci accréditerait l’idée que nous nous trouvons bien sur le site de la synagogue, dont les pierres auraient été vraisemblablement réutilisées pour construire l’église.

Bien des mystères demeurent, notamment la structure même du mikve : pourquoi trois bassins contigus et deux autres, individuels et nettement séparés ?

Les chercheurs nous donneront peut-être un jour la clé du mystère mais en attendant, si vous vous trouvez de passage en Sicile, nous ne saurions trop vous recommander cette visite.


Renseignements utiles : Résidence « Alla Giudecca »
52 via Alagona - Syracuse
e-mail : allagiudecca@hotmail.com
web site : www.allagiudecca.it

 




A PROPOS DE L'AUTEUR
Monique SIAC
  Liens vers les articles du même auteur (13 articles)


COMMENTAIRE(S) DE VISITEUR(S)  2
LES MIKVES DE SYRACUSE - 20 Septembre 2006 - par SEBAG HUBERT <www.dalton-cie@wanadoo.fr>
Je pense que les trois bassins sont séparés des deux autres, c'est pour séparer le Mikvé des hommes du Mikvé des femmes. Trois bassins pour les femmes c'est parce que les femmes vont au Mikvé plus que les hommes.
Le Mikvé de Syracuse... - 11 Juin 2006 - par NAKACHE Emmanuel <emmanuelnakache@yahoo.fr>
A la fin de votre article, vous posez la question: "pourquoi trois bassins contigus et deux autres, individuels et nettement séparés ?"
A celà je répond après avoir vu les photos, les 3 bassins sont probablement les bassins destinés à la vaiselle (n'étant plus en Israel, la vaisselle fabriquée par un non-juif est soumise à la "Tévila"... Et des 2 autres individuels, il est facile d'imaginer que ceux-ci pouvaient servir pour les femmes tout simplement...
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