Logo Lamed.frhttp://www.aish.comAccueil Lamed.fr
...
.

Articles associés

.
...
...
.

Société et Travail

.
...
...
.

Soutenez-nous

.
...
Société et Travail / Philosophie back  Retour
Oui, je respecte la vie 1Nous pensons tous que la vie est un don précieux. Mais savons-nous ce qu'elle signifie réellement?
Tous les matins, à son réveil, le juif récite une prière de remerciements à D.ieu qui lui a rendu son âme après le sommeil nocturne: "Je te remercie, Roi vivant et éternel, de m'avoir restitué mon âme avec miséricorde; grande est ta fidélité." Cette prière, nous la récitons avant même de prononcer une autre parole ou d'accomplir un acte quelconque. Ainsi, chaque matin, s'élève, en priorité, notre hommage quotidien à la vie.

Dans notre prière journalière également, le thème de la vie revient souvent: "Que jusqu'au bout cette année connaisse la vie, l'abondance et la paix"
"Louanges à ton grand Nom de nous avoir accordé la vie! Continue, ô Eternel, à nous maintenir en vie!"
"Vous qui êtes attachés à !'Eternel votre D.ieu, vous êtes bien vivants".

Il s'agit bien de notre vie, mais aussi de celle de nos semblables à laquelle nous devons, pour le moins, le respect.

Plus particulièrement, ce thème de la vie revient dans les prières de Roch Hachana et de Yom Kippour où "les registres de la vie et de la mort"
sont ouverts devant D.ieu, appelé à décider "qui vivra et qui mourra". Certes, nous aimons la vie!

"Oui, je respecte la vie" pourrait s'intituler tout aussi bien "Oui, j'aime la vie" s'il n'était question que de notre seule vie. Il s'agit bien de notre vie, mais aussi de celle de nos semblables à laquelle nous devons, pour le moins, le respect. Ce principe découle de la mitsvah fondamentale, celle qui, de l'avis de Hillel, contient toutes les autres: "Tu aimeras ton prochain comme toi-même" .(Lévitique 19, 18).

Et pourtant, combien d'hommes et de femmes meurent tous les jours: dans des guerres, par des meurtres, dans des accidents de la circulation, par erreur médicale (heureusement rare) ou encore par exécution après condamnation par une justice normale ou expéditive, selon le cas.

Dans les pages qui vont suivre nous allons essayer de comprendre pourquoi, oui pourquoi, nous, juifs, respectons la vie. Quel est pour nous le contenu de cette affirmation. Quel est le sens de ce bien inestimable qu'est la vie. II ne s'agit d'ailleurs pas d'un problème purement philosophique, spéculatif, mais bien aussi d'un problème auquel le médecin tout comme le rabbin, le juge, etc.... est confronté tous les jours: est-il licite de sauver ou de protéger une vie au détriment d'une autre vie?
Que faire aussi quand, pour maintenir la vie, la nôtre par exemple l'on doit transgresser les lois religieuses ou morales?

Autant d'interrogations qui reviennent fréquemment et auxquelles nous nous efforcerons de donner une réponse claire. Volontairement, toutes les situations ne seront pas envisagées, mais seulement les plus fréquentes. Le lecteur voudra bien cependant ne pas tirer hâtivement de cet essai une solution à un problème personnel précis. Chaque cas est un cas d'espèce et devra être soumis, si besoin, aux autorités compétentes.


QU'EST-CE QUE LA VIE?

La vie est une épreuve plus qu'un objet de connaissance ou, comme l'ont souligné les romantiques, une totalité que seul le sentiment nous permet d'appréhender.

A première vue une définition de la vie ne s'impose pas. II suffit de savoir son importance dans le judaïsme - notre vie et celle de nos semblables - pour en déduire le devoir de la respecter. D'ailleurs, dans le judaïsme, on ne peut comprendre la vie si l'on se reporte uniquement à nos textes sacrés tels que nous les lisons communément. Il faut aller plus loin et puiser, en particulier dans la Kabbalah et dans la Tradition orale de maître à élève, cette chaîne du savoir qui n'a jamais été rompue depuis notre maître Moïse.

Avant d'apporter les éléments de définition de la vie d'après le judaïsme, nous allons rappeler brièvement ce qui en a été dit par ailleurs.

La définition de la vie a, en effet, beaucoup préoccupé les philosophes et les penseurs de tous les siècles, encore plus en dehors du judaïsme que dans le judaïsme. Ainsi, on a pu dire que la vie est simplement le temps qui s'écoule de la naissance à la mort. Ou encore, que la vie est l'ensemble des phénomènes (reproduction, nutrition, mort...) qui caractérisent les organismes. Le problème vient de ce que nous ne connaissons pas d'organisme vivant qui ne soit pas matériel. Aussi, les savants se sont-ils efforcés de déterminer quels sont les signes qui permettent de distinguer la vie de la matière:

1) On a d'abord cru que c'était le mouvement (où fallait-il alors classer les éponges ou le corail?)

2) On a pensé que le vivant "assimile et désassimile", c'est-à-dire qu'il se nourrit (or les végétaux absorbent de l'oxygène, des sels minéraux et rejettent du gaz carbonique).

3) Le vivant se caractériserait alors par la fonction de "reproduction". (Or, en 1930, on a découvert les virus, protéines qui se reproduisent et cristallisent comme des minéraux).

II n'y a pas, d'après les savants, de caractère vraiment spécifique de la vie. II reste une certaine spontanéité, ou "élan vital" (Bergson) que certains philosophes ont rattaché à I'énergie générale qui se trouve au fond de tous les mouvements de l'univers. Claude Bernard a tenté d'isoler le vital du physico-chimique en suspendant une à une toutes les fonctions mécaniques et physico-chimiques d'un organisme (par vivisection pratiquée sur des chiens). II en a tiré que la vie ne peut se caractériser que par une "idée directrice" qui semble présider au développement et à la conservation des êtres.

La vie paraît absolument irréductible à la matière. Aucun savant n'a jamais pu reconstruire de la vie à partir de la matière. Mais la matière lui sert de support indispensable. C'est la raison pour laquelle notre intelligence, "adaptée à la matière", ne parvient pas à acquérir une "connaissance de la vie". La vie est une épreuve plus qu'un objet de connaissance ou, comme l'ont souligné les romantiques, une totalité que seul le sentiment nous permet d'appréhender.

D'un point de vue psychologique, l'homme ne peut avoir le sentiment de vivre qu'à l'occasion d'une activité créatrice (art, science, travail, action politique, etc.) et plus particulièrement encore, lorsqu'il éprouve, dans le travail, sa solidarité avec les autres hommes. A ce niveau, la notion de vie s'identifie à la conscience de vivre, c'est-à-dire à la notion philosophique de l'existence, au fait d'apparaître, de se manifester au dehors. Cette dernière notion est le propre de l'homme.

Jusqu'ici, ce chapitre pourrait être le résumé éclectique d'une dissertation philosophique sur la vie, d'un point de vue laïc. Qu'en est-il d'après le judaïsme? II suffirait .... d'y ajouter la notion de D.ieu-Créateur, source de toute Vie.

LE SOUFFLEUR DE VERRE OU LES DIFFERENTS NIVEAUX DE L'AME

Une métaphore, empruntée au Midrach, nous permet de mieux percevoir le phénomène de la vie: nos Sages ont comparé l'insufflation de la vie dans Adam, le premier homme (Genèse 2, 7), à l'action du souffleur de verre. L'air que l'ouvrier introduit dans le verre se divise en trois parties, liées l'une à l'autre, sans solution de continuité: une première partie est entièrement dans le récipient, une deuxième se trouve dans le tube intermédiaire, la troisième partie demeure dans la bouche de l'ouvrier. Et il s'agit, de bout en bout, de l'air qui appartient en propre et entièrement au souffleur (Sanhédrine 91a).

Ainsi en fut-il d'Adam à qui D.ieu lui-même a insufflé une âme vivante (contrairement aux autres formes de vie, produites, elles, par la terre ou par les eaux). L'âme humaine a plusieurs composantes qui sont autant d'échelons entre D.ieu et l'homme. C'est cette notion que Jacob saisira dans un rêve sous la forme d'une échelle suspendue du ciel vers la terre (Genèse 28).

Ces échelons sont:

1. Néfèche

C'est le premier degré de la vie, au sens le plus élémentaire. Nos Sages lui reconnaissent pour substrat la masse sanguine qui contient tous les éléments nutritifs nécessaires à l'organisme vivant. "Seulement, évite avec soin de manger le sang, car le sang c'est la vie (néfèche) et tu ne mangeras pas la vie (néfèche) avec la chair" (Deutéronome 12, 23).

De la même manière que cette force vitale se trouve dans les animaux, elle se trouve aussi dans le règne végétal, organique ou minéral, "de l'infiniment grand à l'infiniment petit". II s'agit de la force statique qui maintient ensemble les différentes parties du corps ou les atomes d'une molécule. Cela découle du sens étymologique du mot néfèche qui veut dire "repos" .

C'est pourquoi nos Sages ont situé, pour fixer les idées, le néfèche dans le foie, en hébreu kaved (l'étymologie de kaved évoque la pesanteur, l'immobilisme). Sur le plan spirituel, pour l'homme, néfèche correspond à l'action, étant bien entendu que le point culminant de cette action consiste en l'accomplissement de la mitsvah: l'action est en retrait par rapport à la pensée, comme le monde matériel par rapport au spirituel. Souvent, nous avons une pensée pure, généreuse, transcendante mais quand arrive le stade de la réaliser, il s'y mêle bien des considérations d'honneur, de compétition, de jalousie qui en diminuent la valeur morale. Entre la mitsvah que nous voulions accomplir et celle que nous avons faite, il y a une marge.

2. Roua'h

Littéralement: "vent" mais habituellement on le traduit par "esprit".

Sur le plan matériel, c'est l'énergie qui provoquera le mouvement, notamment celle qui fait circuler le sang dans notre organisme. Nos Sages l'ont localisé dans le cœur qui (comme on le sait depuis seulement trois siècles!) est le seul organe qui se contracte régulièrement toute la vie durant indépendamment de notre volonté.

Ainsi est-il du mouvement aussi petit soit-il qui caractérise tous les vivants (cf. le commentaire de Nahmanide sur Genèse 1, 20). Sur le plan spirituel, il s'agit de la vie sentimentale, passionnelle, restrictive, sensitive dont l'expression humaine est la parole et la prière.

3. Nechama

L'homme n'a pas d'emprise sur sa nechama; elle est comme l'air qui reste dans la bouche du souffleur; il a la possibilité de la recouvrer ou de l'éloigner de lui.

Du même sens que nechima : respiration. Nous respirons un air pur et rejetons de l'air impur.

C'est ce pouvoir de discernement qui existe dans les organismes vivants. Sur le plan spirituel, la nechama c'est la pensée au degré le plus élevé et nos Sages l'ont localisée dans le cerveau. II s'agit de la pensée humaine et surtout la pensée de la Torah avec laquelle nous devons accorder notre propre pensée.

La nechama était le propre d'Adam avant la faute. Après la faute, elle n'était plus à proprement parler en lui. Par contre, Israël l'avait au Mont Sinaï avant la faute du veau d'or et Moïse la possédait d'une façon permanente. En effet, l'homme n'a pas d'emprise sur sa nechama; elle est comme l'air qui reste dans la bouche du souffleur; il a la possibilité de la recouvrer ou de l'éloigner de lui. Quoi que nous fassions, notre nechama reste pure: "Eternel, mon D.ieu, l'âme que tu as mise en moi, elle est pure" (prière du matin).

Par la techouva ( le retour à D.ieu, le repentir), l'homme peut réparer et refaire le lien solide entre les trois niveaux de son âme que nous venons d'énumérer. Son rôle est d'assujettir son cœur à sa raison.

C'est pour lui permettre la techouva que D.ieu dit: "Et maintenant (après la faute), il (Adam) pourrait étendre sa main et cueillir aussi du fruit de l'arbre de la vie; il en mangerait et vivrait à jamais." D.ieu le chassa donc du jardin d'Eden (Genèse 3, 22).

Si après la faute, Adam avait mangé du fruit de l'arbre de la vie, il n'aurait plus pensé à la réparation de sa faute, à la techouva. II serait resté vivant et souillé à jamais par le péché. Tandis que mortel et loin du jardin, il pensera à la mort, ce qui l'amènera inévitablement à réfléchir sur sa faute et sur sa réparation. Ainsi, il pourra, selon le vœu et I'''espoir" de D.ieu, recouvrer son état initial paradisiaque.

4. 'Haïa

S'il arrive à l'homme de franchir les trois premiers niveaux ci-dessus, son action devient positive sur le plan métaphysique. II obtient '' l'esprit saint"(rouah hakodech)

5. Ye'hida

Littéralement: "unification". C'est le degré de la vie humaine le plus élevé. L'on obtient alors l'inspiration divine, c'est-à-dire la prophétie. Le prophète "unifie" toute la création à son Créateur. II est important de noter que, dans la Tradition juive, même la prophétie est le fruit d'un apprentissage. II y avait, à l'époque biblique d'Israël, à l'époque du Temple, des, "Ecoles de Prophètes".

Publié par le département de l'Education et de la Culture par la Torah dans la diaspora de l'Organisation Sioniste Mondiale, Jérusalem, B.P. 92, 1982



A PROPOS DE L'AUTEUR
le Dr Raphaël Y. YELLOZ
Médecin attaché des hôpitaux de Paris
  Liens vers les articles du même auteur (3 articles)


COMMENTAIRE(S) DE VISITEUR(S)  2
les cinq degré de la nechama - 1 Mai 2006 - par perez marcel
j'ai cette article très interressant et d'un langage simple et accessible à tous.merci
28 Janvier 2006 - par TIOTSOP Boniface
J'ai consulté votre texte dans le cadre d'une recherche sur "Le poids des morts sur la pauvreté des hommes". Il m'a fallu connaître le point de vue des différentes religions sur la question.
Emettre un commentaire
 Nom
 Prénom
 Email *
 Masquer mon email ?
Oui  Non
 Sujet
 Description (700 caractères max) *
 * Champs obligatoires
...
.

Outils

MODIFIER LA TAILLE DU TEXTE
.
...
...
.

Et aussi...

.
...