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Paracha / Dvar Torah back  Retour

Une flamme autonome

La manière dont on allumait la Menora propose une approche pédagogique de l’enseignement de la Torah.

Dans sa première partie, la Paracha parle de la Menora, du candélabre. Aaron devait allumer ce chandelier chaque jour. Selon les termes du verset : « Quand tu élèveras les bougies » (Nombres 8 : 2).

Les commentateurs s’interrogent sur cette expression. On se serait plutôt attendu à la formule : « Lorsque tu allumeras les bougies ». Pourquoi est-il donc dit : « Lorsque tu élèveras » ?

Rachi, rapportant le Talmud au traité Chabbat (21a), explique que cela vient enseigner que Aaron devait allumer les bougies jusqu’à ce que la flamme s’élève d’elle-même, de sa propre force, et non plus par la force de celui qui a allumé ce feu. Même une fois que celui qui allume se soit retiré, il faut que la flamme puisse continuer à exister grâce à l’huile que contient la bougie.

Seulement cela semble bien évident. Pour que le feu puisse perdurer, il est nécessaire qu’il continue à brûler de lui-même. Pourquoi a-t-on besoin d’un verset pour cela ?

En fait la Torah vient enseigner un principe très important. La Menora symbolise la Torah, puisque la lumière c’est justement la Torah. D’ailleurs, nos Sages, disent au traité Baba Batra (25b) que celui qui veut devenir Sage, doit orienter sa prière vers le sud, car la Menora se trouvait justement au sud. C’est que la Menora symbolise la sagesse de la Torah.

Le maître doit s’assurer que l’élève parvienne à une autonomie dans l’étude et qu’il continue à briller même en l’absence de son maître.

Le processus d’allumage de la Menora évoque en réalité la façon d’enseigner la Torah. Le maître, qui représente celui qui allume, doit enseigner à l’élève de façon à ce que la flamme du disciple « s’élève d’elle-même ». Le maître doit s’assurer que l’élève parvienne à une autonomie dans l’étude et qu’il continue à briller même une fois que le maître se soit retiré. L’élève doit parvenir à réfléchir et à se développer dans l’étude, par ses propres moyens, sans être constamment dépendant de son maître. Tel est le message que veut transmettre la Torah lorsqu’elle dit que « la flamme doit s’élever et briller d’elle-même ».

Le maître doit se contenter de frayer la voie, « d’allumer la bougie ». Mais par la suite, l’étudiant doit pouvoir développer cette sagesse de lui-même, grâce aux moyens dont il dispose et qu’il détient du maître. Un élève dont la sagesse se résume à ce que le maître a enseigné, ne pourra jamais devenir un vrai Sage. Il est comparable à un magnétophone, qui est tout aussi capable de répéter ce qu’il a « entendu ». Le maître doit surtout veiller à ce que l’élève puisse s’épanouir de façon autonome et établir des conclusions même dans des domaines que le maître ne lui a jamais exposé.
Autrement, la flamme finira par s’éteindre.

L’essentiel est que l’élève intègre l’enseignement et en fasse partie de lui-même de sorte qu’il puisse développer la pensée du maître.

Le Rabbin Haïm Chmolevitch, un Maître de la morale juive du 20ème siècle, expliquait que quelqu’un qui ne sait dire rien d’autre que : « Voici ce que mon maître dit à ce sujet », n’est pas un vrai disciple.

Un vrai disciple c’est celui qui sait déduire ce que le maître dirait sur tel problème qui n’a jamais été vraiment tranché par le maître. Car cela indique que l’élève est devenu autonome dans l’étude, fort de l’enseignement qu’il a reçu. Il a intégré le mode et la logique de pensée de son maître et sait s’adapter à tous les domaines.

On raconte sur le Maharil Diskin, un Maître contemporain, que lorsqu’il étudiait un chapitre dans un livre de Torah, il était alors capable de deviner ce que l’auteur dirait sur un tout autre sujet. Voilà ce que le maître doit veiller à obtenir de ses élèves.

Le Talmud, au traité Yoma (66b) dit que Rabbi Eliezer fils de Horkenos n’a jamais dit un enseignement qu’il n’ait pas entendu de son maître. D’autre part, la Guemara rapporte que lorsque son maître lui demandait d’exposer un commentaire, il en disait un que personne n’avait jamais entendu.

Apparemment, on est face à une contradiction. Si Rabbi Eliezer ne faisait que répéter les propos de son maître, comment pouvait-il donc dire une explication que personne n’a jamais entendue. N’est-ce pas qu’au moins le maître l’aura déjà connu, puisque c’est lui l’auteur !

En réalité, il est vrai que Rabbi Eliezer ne disait que ce qu’il entendait de son maître. Seulement, dans sa réflexion et ses profondes déductions, il « entendait » des paroles du maître ce que même le maître n’a jamais dit. Il a intériorisé le système de pensée de son maître et était capable d’en faire ressortir des enseignements totalement nouveaux. Il était donc bien un vrai disciple, dont la flamme s’élevait d’elle-même.

Dans le même ordre d’idée, le Rabbin Eliahou de Vilna, plus généralement connu sous le titre de Gaon de Vilna, disait que lorsque le maître délivre son enseignement, l’une des méthodes pédagogiques est de ne pas exposer l’enseignement jusqu’au bout. Il est bon de laisser un point en suspens, qui n’a pas été expliqué totalement. Cela, pour que l’élève arrive, de sa propre initiative, à fignoler et à parfaire le sujet. Il essayera de résoudre le problème par ses propres moyens et cultivera ainsi sa soif de l’étude et sa soif de comprendre. Le véritable enseignement doit revenir à développer un système de pensée permettant de construire l’élève qui a intériorisé ce système.

Ce qui est valable dans l’étude, l’est aussi par rapport à la foi en D.ieu et à la crainte du Ciel. L’homme est, la plupart du temps, influencé par l’entourage. Un homme qui vivrait dans une ambiance religieuse, avec des Juifs pratiquants, sera influencé par cette ambiance et sera lui aussi probablement pratiquant. Toutes ces considérations sont extérieures à la personne. Ce sont elles qui allument la flamme de la pratique religieuse.

L’homme ne doit pas respecter les commandements par habitude, de façon extérieure à lui-même ; la pratique doit venir de l’intérieur.

Seulement, il est absolument impossible de se contenter de cela. Là aussi, la flamme doit s’élever d’elle-même. L’homme ne doit pas respecter les commandements par habitude, de façon extérieure à lui-même. La pratique doit venir de l’intérieur, sans se cantonner à l’habitude. De la sorte, l’homme sera en constante élévation et progression. « La flamme s’élèvera ». L’homme doit vivre dans une dynamique de vie spirituelle : combler ses défauts, cultiver les qualités, vivre la Torah avec profondeur.

Il s’agit bien de vivre pleinement et profondément son judaïsme. C’est seulement de cette façon que l’on peut progresser dans la Torah et que la « flamme » est assurée de ne pas s’éteindre.

Un élan religieux qui ne serait motivé que par des motifs extérieurs ne peut perdurer. Lorsque ces motifs disparaîtront, la pratique s’évaporera avec eux. Mais, un Juif profondément religieux, conscient que la Torah et les Mitsvot constituent la raison même de sa vie, conservera son élan même si plus rien ne le pousse. A l’image de l’élève qui continue à s’épanouir même une fois que son maître s’en est allé. C’est que tout le but est d’intégrer profondément le judaïsme. Même une fois que celui qui allume la bougie s’en est allé, la flamme doit continuer à brûler par elle-même, grâce à ses propres ressources intérieures.

Et, à l’image de l’élève qui, ayant intégrer le système de son maître, parvient à développer de nouveaux concepts jamais encore abordés explicitement par le maître, celui qui vit son judaïsme en profondeur, ne cessera de renouveler ses bonnes décisions et d’enrichir ses bonnes actions, de façon à même dépasser ce qu’il a reçu de son environnement extérieur. De cette façon, le feu « s’élèvera de lui-même ».



A PROPOS DE L'AUTEUR
Michaël Mouyal
Michaël Mouyal est élève au Séminaire Israélite de France
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COMMENTAIRE(S) DE VISITEUR(S)  3
Excellent - 6 Juin 2012 - par DREYZEL Dan
Clair, et concis.
Hazak.
l,Independance et l,inisiative - 16 Janvier 2011 - par Chekroun Samuel
je ne peut que vou congratuler pour
l,interet et l,attention dont j,ai eu plaisir
de decouvrir dans la lecture de votre expose je ne suis pas un erudis mais a
mon age (85) je defriche et recherche le
contact de mon atavisme.
Hazak - 16 Juin 2005 - par Lellouche Antony
Je voulais tout simplement féliciter (sans lui enlever son z'hout) Michaël Mouyal, sur l'approche toujours nouvelle qu'il nous donne d'un sujet de la Paracha.
Depuis le Dvar Thorah sur la paracha Emor qui était véritablement magnifique, je m'empresse de venir m'imprégner d'une nouvelle vision de la Paracha chaque semaine.
J'essaie à mon tour le Chabat de rapporter l'idée maîtresse du dvar, en n'oubliant pas de rapporter son nom.

Hazak Oubarou'h.
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