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Sorcellerie et judaïsme

Entre Dieu et le monde de la nature a été jeté un pont appelé le " domaine de l'occulte ". Traverser ce domaine est lourd de dangers, et y déraper signifie tomber dans les abîmes de l'idolâtrie.

La plupart des enfants se passionnent pour les histoires de sorcières et de démons. Dans le monde aride et rationnel qui est le nôtre, ces forces mystérieuses ajoutent un élément d'amusement et d'engouement et elles excitent l'imagination. Elles permettent aux jeunes enfants de subodorer qu'il existe un moyen de combattre un système impitoyable et insensible.

Etes-vous né dans la pauvreté ? Soyez rassuré : une merveilleuse fée se présentera devant votre seuil et vous donnera la fortune que vous désiriez tant. Un gêneur prétentieux vous tourmente-t-il impitoyablement ? Un charme lui sera lancé et il finira ses jours en écureuil.

Les films de sorcellerie procurent aux adolescents un frisson momentané d'excitation et d'effroi, et un sentiment fugitif de terreur : Et s'il y avait réellement quelque chose de vrai dans tout cela ? !
 

Trois approches générales

Quand une personne mûrit, on peut voir émerger en elle trois approches générales vers l'occultisme et d'autres forces mystérieuses.

Il y a ceux qui adoptent une attitude sérieuse, rationnelle, et qui rient de tout cela. Pour ceux-là, le monde est rationnel, quantifiable et le reste n'est que mascarade.

Il y a ceux qui sentent que le monde possède une dimension spirituelle et qu'il contient des mystères qui nous sont incompréhensibles.

On trouve également un deuxième groupe de gens, ceux qui sont portés vers ce qui est du ressort de l'esprit, de l'art, de la poésie, etc. Ils sentent que le monde possède une dimension spirituelle bien à lui, et qu'il contient toutes sortes de forces et de mystères inaccessibles à la raison. Leur monde est celui du marc de café, des tarots, des boules de cristal et des prédictions psychiques.

Il y a enfin des gens très profondément religieux, dont la vision du monde est celle d'une grande bataille entre les deux ensembles de forces qui se le partagent : celles du bien et celles du mal. Celui qui préside aux forces du bien est Dieu, assisté par une foule d'anges, de saints, de martyrs, etc. Celui qui dirige les forces du mal est le diable, assisté par les démons, les succubes et les esprits malfaisants. Leur monde est particulièrement menacé par des personnages comme ceux que l'on trouve dans les bandes dessinées, littérature largement inspirée par la sévérité avec laquelle la Bible considère la sorcellerie.
 

Pas juif

Aucune de ces trois approches générales n'est en harmonie avec le judaïsme. Quelle est l'attitude de la Tora à propos de la sorcellerie ?

La Tora adopte une attitude très négative envers les diverses formes de sorcellerie :

" Une sorcière, tu ne la laisseras pas vivre " (Exode 22, 17).

" Quand tu viendras vers le pays que Hachem te donne, tu n'apprendras pas à faire comme les abominations de ces nations-là. Il ne sera pas trouvé chez toi […] de faiseur de sortilèges, de magicien ni de devin ni de sorcier […] et d'interrogateur des morts. Car quiconque fait ces choses-là est abomination devant Hachem, et à cause de ces abominations-là, Hachem, les dépossède de devant toi " (Deutéronome 18, 9-12).

Pourquoi une telle dureté ? Qu'y a-t-il de mal à ces pratiques ?

Le système de pensée qui fait état d'un prétendu combat du " diable " contre Dieu constitue un reniement du judaïsme, car il contient un relent de dualisme. Dieu est Un, et absolument Un. Il agit, certes, de beaucoup de manières différentes, mais il n'y a pas " deux " armées au sens plein du mot.

Le judaïsme parle, il est vrai, du " Satan ", mais il le considère comme un agent de Dieu, chargé de mettre à l'épreuve la sincérité des actions de l'homme, la force de ses convictions, et l'endurance de sa fibre morale. Bien que ce prétendu diable semble inciter l'homme à faire le mal, il n'est pas fondamentalement maléfique. Son rôle consiste, en fait, à se livrer à des provocations : inciter ouvertement au mal, mais dans la réalité travailler pour Dieu. Une lecture même superficielle du livre de Job permet de recueillir ce message : Dieu envoie Satan pour mettre à l'épreuve la vertu de Job.

De même qu'un dentiste ou un médecin testent la solidité d'un os ou d'un muscle en les sondant, de même qu'un service de renseignements vérifie l'intégrité et la loyauté de ses agents en les mettant à l'épreuve, de même Dieu scrute-t-il l'homme. Une épreuve permet de révéler la valeur intérieure des actions d'une personne, et de montrer de quoi elles sont réellement faites.

Aussi bien, si la magie et l'occultisme existent, pourquoi sont-ils aussi haïssables ?
 

Bonne magie et mauvaise magie

Nous trouvons dans les sources talmudiques mention de beaucoup de sortes de " bonne magie ", comme les bénédictions, les amulettes, etc. Comment distinguons-nous entre les deux catégories de forces spirituelles ?

L'explication à laquelle on fait le plus souvent appel est celle de Nahmanide, le grand penseur du XIIème siècle. Nous allons essayer d'adapter et d'expliquer son point de vue.
Bien que Dieu ait été le créateur unique de l'univers, Il a créé un système autonome de la " nature " qui sert de strate intermédiaire entre Lui et l'homme.

Le système de la nature est indépendant et il possède ses lois ainsi que ses causalités. Etant donné que l'on peut employer ce système sans avoir recours à Dieu, il donne libre cours à l'athéisme. Il est facile de penser que le système fonctionne de manière autonome, indépendamment de Dieu. La gravité, l'inertie, l'électromagnétisme, etc. fonctionnent tous sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que l'observateur est un pécheur ou un saint. Celui qui accepte les phénomènes de la nature, sans se soucier de leur cause, sans être sensible à la manipulation par Dieu des événements naturels, est incité par ce système-là à ne pas croire en Lui.

Le monde du domaine quasi-spirituel a l'aptitude de soumettre les règles de la nature par des miracles et de la magie.

Entre Dieu et ce monde de la nature a été jeté un autre pont, que nous appellerons le " domaine de l'occulte " ou le quasi-spirituel. Il a l'aptitude de changer et de soumettre les règles de la nature par des miracles, de la magie, etc. Mais ce monde quasi-spirituel, bien qu'il soit au-dessus de la nature elle-même, n'est pas encore le domaine divin. Il a ses règles et ses modes de fonctionnement, et il est peut-être plus puissant que le monde physique, mais certainement pas tout-puissant.


Est-ce que nous devons faire usage de ce monde de la manière dont nous avons l'obligation de faire usage du monde physique ?

Nahmanide considère que, d'une manière générale, Dieu ne désire pas que nous fassions usage de ce monde-là. Il avait voulu que nous prenions conscience de Sa divinité à l'intérieur du monde naturel, et au travers de ses phénomènes. Celui qui pervertit le système de la nature, en utilisant constamment le monde surnaturel, va à l'encontre de la volonté de Dieu.

Lorsqu'il est arrivé à des hommes éminents d'employer des forces situées dans l'ordre du surnaturel, ils ont toujours mis l'accent sur le fait que les miracles ainsi générés ne faisaient que démontrer la toute-puissance de Dieu et Son aptitude à dépasser les phénomènes naturels. Cela ressemble - même s'il y a des dissemblances - aux miracles que Dieu a exécutés pour Israël en Egypte dans le dessein d'établir certaines vérités divines. Quand une personne irréprochable emploie occasionnellement l'entremise divine, elle met en valeur ces grandes vérités.
 

Un danger d'infidélité

C'est là précisément que réside le danger d'une réelle infidélité. On peut avoir compris que les lois de la nature sont par elles-mêmes insuffisantes pour expliquer le monde, s'être introduit dans ce monde plus spirituel et être parvenu à un mélange de toutes sortes de " créatures spirituelles ". Si l'on comprend alors qu'elles sont des agents de Dieu, cela devient une véritable expérience spirituelle. Mais si on les conçoit par erreur comme étant indépendantes de Dieu, on s'engage alors dans un processus d'idolâtrie ! Ces forces, quand elles sont considérées comme un pouvoir alternatif se substituant à Dieu, deviennent alors une source du mal.

Peut-être la meilleure manière d'illustrer cette double approche est-elle constituée par l'anecdote du " serpent d'airain " :

" Le peuple parla contre Eloqim et contre Mochè […] Hachem envoya contre le peuple des serpents brûlants, ils mordirent le peuple, il périt un peuple nombreux en Israël […] Hachem dit à Mochè : "Fais-toi un serpent [d'airain] et place-le sur une perche ! Quiconque sera mordu, il la regardera et vivra." Mochè fit un serpent d'airain et le plaça sur une perche. Si un homme avait été mordu par un serpent, il fixait son regard vers le serpent d'airain et il vivait " (Nombres 21, 4-9).

La Michna (Roch hachana 29a) s'emploie à analyser cette anecdote :

" Est-ce le serpent qui guérissait ou qui tuait ? En réalité, quand Israël regardait vers là-haut, et lorsqu'ils dédiaient leurs cœurs à leur Père dans le ciel, [ils étaient guéris], et quand ils ne le faisaient pas, ils étaient décomposés. "

Nous trouvons ici les deux facettes du surnaturel : Dans un premier temps, la nature miraculeuse du serpent a incité les gens à se rendre compte que l'épidémie qui s'était abattue sur eux était l'œuvre de Dieu, et ils ont déployé des efforts pour s'améliorer. En ce sens, cela fut une expérience spirituelle positive.

Par la suite, cependant, les choses se sont dégradées, et le serpent, au lieu d'être un moyen de reconnaître Dieu, est devenu un point focal en soi, c'est-à-dire un merveilleux instrument de guérison, indépendant du pouvoir de Dieu. C'était de l'idolâtrie. Pour cette raison, plusieurs centaines d'années après, le roi Ezéchias a fait détruire ce serpent d'airain parce qu'on en avait fait une idole !
 

Comprendre l'adoration des idoles

L'adoration des idoles correspond à la conscience qu'il existe beaucoup de forces dotées de divers pouvoirs sur l'humanité et peut-être même sur Dieu. L'idolâtre pense qu'il pourrait employer ces " pouvoirs " contre Dieu si seulement il savait comment les lui arracher.

C'est comme si le pouvoir de Dieu était contenu dans un fusil qu'Il aurait tenu dans Sa main. L'idolâtre pense que s'il pouvait arracher le fusil de Sa main, il pourrait alors exercer ce pouvoir. Il assimile les sortilèges de la sorcellerie à l'aptitude à vaincre Dieu.

Le meilleur exemple de cette manière de penser nous est proposé par le prophète impie Bil'am, que la Tora appelle un " sorcier ". Il était très bien informé dans ce domaine de l'univers. Il se gardait bien, pour parvenir à ses fins, d'employer contre Dieu le monde de la magie. Il pensait qu'il comprenait l'état d'esprit de Dieu et qu'il parviendrait, au moyen de ses astucieuses manipulations, à Le dépasser en matière de subterfuges !

Cela constitue, d'une certaine manière, la pire forme possible d'idolâtrie. D'une part, la personne s'implique dans quelque chose de " réel ". Ce n'est pas une pierre sur laquelle un esprit primitif a fantasmé jusqu'à en faire un dieu, mais c'est un pouvoir, et qui fonctionne. Cependant, ce pouvoir est absolument faux, parce qu'il n'existe rien qui soit indépendant de Dieu.

La moralité, voilà ce qui sert de " révélateur " de la " spiritualité ". Dépourvue de moralité, toute " spiritualité " est fausse ou pernicieuse.

Pour nous, le test " révélateur " de la " spiritualité " est la moralité. Toute forme de " spiritualité " qui ne formule pas d'exigences morales pour l'être humain, qui ne cherche pas à le rapprocher de Dieu, ou qui n'élève pas le potentiel divin contenu dans l'homme, cette spiritualité-là est fausse ou pernicieuse.


Si une personne pratique des " rites occultes " et si leur contenu est un marmonnement de mots étranges, de costumes bizarres, ou de rites incompréhensibles, il est soit faux soit pernicieux. Il est habituellement faux, mais dans les cas où l'on s'est introduit dans ces pouvoirs, il devient pernicieux car il traduit un divorce avec Dieu.

Ceux de nos grands Maîtres qui ont exécuté des actes surnaturels, les ont utilisés pour susciter un message à propos de Dieu. Ils ont incité les gens à reconnaître le Créateur, à améliorer leur caractère, à être bons les uns envers les autres, à être honnêtes et fidèles, à maîtriser leurs instincts, etc. Compris dans le plus vaste contexte de Dieu, de la Tora et de la morale, ces miracles inhabituels étaient vraiment des révélations divines.



A PROPOS DE L'AUTEUR
le Rabbin Ahron LOPIANSKY
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COMMENTAIRE(S) DE VISITEUR(S)  1
Judaïsme et sorcellerie - 29 Octobre 2002 - par Mickaël
Très bien ! Il était temps qu'on se livre enfin à une analyse thoranique de toutes les déviances à la mode. Continuez dans cette voie. Autres sujets possibles : le succès de W.Disney, le Sida, le chômage, ce qu'il advint de 'Ham au sortir de l'arche, etc. Hatsla'ha raba lakhem !
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