" Ne crois pas en d'autres
dieux " - C'est donc qu'il est interdit de croire qu'il puisse exister
dans l'univers d'autres pouvoirs que celui de D.ieu.
On peut comprendre qu'une action positive, comme la conscience de l'existence
de D.ieu ou l'amour de D.ieu, puisse être une mitsva " permanente
". Mais comment une interdiction peut-elle être considérée
comme une mitsva " permanente " ?
Prenons l'exemple de la nourriture non cachère. Si notre agent de voyage
a oublié de commander pour nous un repas cachère, et que, huit
heures durant, on serve dans l'avion d'appétissants rôtis bien
juteux, tandis que nous devons nous contenter d'une boissons gazeuse et de cacahuètes…
alors il paraît certain que nous accomplissons la mitsva de ne pas manger
de la nourriture non cachère.
Cela est-il si certain que cela ? Non ! Le respect d'une interdiction suppose
une situation où l'on est soumis à une tentation de la violer
et où l'on surmonte le désir de le faire.
Si donc l'interdiction de croire en d'autres dieux est une mitsva " permanente
", cela signifie que la tentation de croire en autres dieux est tout aussi
permanente !
Pourquoi cette tentation
est-elle permanente ?
Dans les Psaumes, le roi David dit : " Qu'il n'y ait pas en toi de dieu
étranger ! " Quelle sorte de dieu étranger repose dans l'être
humain ?
Le Talmud (chabbath 105b) identifie ce dieu étranger comme le yètsèr
hara' - l'inclination qui pousse l'homme à s'autodétruire en s'éloignant
de D.ieu. Le yètsèr hara' essaie constamment de nous faire oublier
que D.ieu est le seul pouvoir dans l'univers.
Dans un sens pratique, les " pouvoirs de l'univers " désignent
ce que nous croyons être les arbitres ultimes de notre réussite.
Maïmonide explique que l'idolâtrie n'est pas une étape isolée,
mais un processus. Il y a très longtemps, quand l'adoration des idoles
était un défi spirituel sérieux, on sculptait un morceau
de pierre que l'on appelait le " dieu soleil. " On voulait ainsi rendre
hommage à D.ieu en tant que créateur du soleil. Mais on en est
venu rapidement à adorer le soleil lui-même. On croyait que quelque
chose d'autre que D.ieu était la source ultime de la force et du salut.
Les hommes ont commencé par se concentrer clairement sur les priorités
de vie. Mais ils s'en sont ensuite détournés.
Aujourd'hui, bien que l'adoration d'idoles au sens classique ait presque entièrement
cessé, il n'est pas rare de croire que l'argent, la gloire, les stock-options,
les ordinateurs ultra performants, ou un bonne présentation soient la
source de la complétude et du bonheur. Voilà la forme moderne
que prend l'idolâtrie !
Plus grave encore, nous faisons face aujourd'hui à un plus grand défi
: Devons-nous attribuer nos succès à D.ieu… ou à
nous-mêmes ?
S'attribuer le pouvoir
ne nous donne pas plus de pouvoir
" Peut-être mangeras-tu et seras-tu rassasié, tu te construiras
de bonnes maisons, et t'y installeras… tu deviendras très riche
et auras de tout… Alors tu deviendras arrogant, tu oublieras D.ieu…
Tu te diras alors : Ma force et la puissance de ma main m'ont fait ce succès-là
" (Deutéronome 8, 12-17).
Je suis intelligent. Je suis solide. Je suis riche. Qu'ai-je besoin de D.ieu
?
Penser que l'on peut agir seul équivaut à " croire en d'autres
pouvoirs que D.ieu ". Pourquoi est-ce aussi destructif ? Parce que, quand
on s'attribue à soi-même son propre pouvoir, on se prive de la
possibilité d'en faire plus. Toutes les fois qu'une tâche devient
trop difficile ou trop pénible à entreprendre, on dira : "
Je ne puis le faire ! " Et l'on expliquera ainsi ce refus : " Tout
ce que j'ai fait jusqu'à présent, je l'ai fait grâce à
mes propres forces. Ce que l'on me demande à présent : changer
le monde, me perfectionner, voilà qui est impossible ! "
Toutes les fois qu'une tâche devient trop difficile ou trop pénible à entreprendre, on dira : " Je ne puis le faire ! "
Quand les gens cessent d'essayer,
c'est parce qu'ils croient en un " dieu étranger " intérieur,
le yètsèr hara' qui leur dit : " C'est grâce à
mon pouvoir. Sans moi, rien ne peut être fait. "
Laquelle de ces deux affirmations est exacte ?
- " Je peux aimer toute l'humanité, je peux observer chabbath, je
peux étudier la Torah chaque jour, je peux accomplir les six mitsvoth
"permanentes". "
- " Je ne peux pas aimer toute l'humanité, je ne peux pas observer
chabbath, je ne peux pas étudier la Torah chaque jour, je ne peux pas
accomplir les six mitsvoth "permanentes". "
L'affirmation selon laquelle " je ne peux pas " est plus exacte. Parce
que, à dire vrai, " je " ne peux rien faire du tout. C'est
seulement parce que D.ieu m'en donne le pouvoir que je peux lacer mes chaussures
le matin !
Il ne faut pas croire que le fait de s'attribuer le mérite de ses accomplissements
nous donne confiance pour entreprendre d'autres choses. Au contraire, on abandonnera
beaucoup plus vite.
Si en revanche on se rend compte que tout ce que l'on accomplit est un don gratuit
de D.ieu, cela fait prendre conscience qu'il n'existe aucune limite à
ce qu'on peut accomplir. Parce que, avec le Tout-Puissant derrière soi,
il n'y a plus aucune raison de dire : " Je ne le puis ! "
Voilà pourquoi c'est là une mitsva " permanente ". On
a besoin d'efforts surhumains pour éviter de lancer : " Regardez
ce que j'ai fait ! Voyez qui je suis ! " Si l'on s'attribue le mérite
de ce que l'on a fait, le lien avec le Tout-Puissant disparaît aussitôt…
Examinons les trois domaines où les gens s'attribuent le plus fréquemment
et d'une manière inappropriée le mérite de leurs actes
:
1) Les aptitudes naturelles.
2) Les accomplissements.
3) La bonté.
S'attribuer
le mérite de ses aptitudes naturelles
Quelqu'un vient nous dire : " Lève une de tes mains, et je vais
te montrer mon intelligence en te disant si c'est la droite ou la gauche ! "
Hem ! Tu veux m'impressionner par ton acuité visuelle ?
Aussi ridicule que cela paraisse, les gens s'attribuent souvent le mérite
des aptitudes naturelles avec lesquelles ils sont nés. Un génie
tend à penser qu'il est supérieur à tout le reste du monde.
Mais est-il meilleur que quelqu'un qui posséderait une acuité
visuelle de 20/20 et qui se trouverait dans une pièce avec plein de gens
portant lunettes ? Et parlons de notre dernière grippe, pendant laquelle
nous claquions des dents tandis qu'un ami se vantait : " Moi ? Je ne tombe
jamais malade ! J'ai une santé de fer ! "
Les gens qui sont beaux ou intelligents sont souvent tentés de devenir
arrogants, puisque la société attribue tant de valeur pour ces
qualités. Nous ne suggérons pas ici que la beauté des gens
devrait les inciter à s'effacer. Mais comment peut-on s'attribuer quelque
mérite que ce soit pour quelque chose que l'on n'a pas eu à développer
soi-même ?
Ne laissons jamais nos aptitudes naturelles devenir une source d'arrogance !
Remercions plutôt D.ieu de nous les avoir données !
S'attribuer le mérite
de ses accomplissements
Quelqu'un vient nous dire : " Tu ne croiras jamais ce que je viens de faire
! En ouvrant mon courrier, j'ai trouvé un chèque de plusieurs
millions. C'était l'héritage laissé par un oncle perdu
de vue depuis longtemps. J'ai encaissé le chèque, et je suis maintenant
millionnaire. Incroyable, n'est-ce pas ? "
De quoi est-il si fier ? Il n'a rien fait pour gagner une telle somme !
Il en est de même quand nous mettons en œuvre nos potentialités.
Nous appliquons nos talents naturels à quelque chose que nous voulons
réaliser, à quelque chose qui soit significatif. C'est comme encaisser
un chèque de plusieurs millions.
L'artiste, le chirurgien du cerveau, le musicien utilisent tous les talents
que D.ieu leur a donnés pour s'engager dans une grande carrière.
Si le Tout-Puissant ne leur avait pas donné du talent pour peindre, une
main sûre pour opérer, ou de l'oreille pour la musique, ils n'auraient
rien accompli.
On a besoin, bien entendu, pour parvenir à des résultats, de déployer
des efforts. Mais les matières premières - et les circonstances
qui leur permettent d'être mises en œuvre - sont toutes fournies
par D.ieu.
Il est tentant de dire : " Regarde ce que j'ai fait ! " Mais cela
revient à s'attribuer le mérite d'avoir " encaissé
le chèque ". Remercions plutôt D.ieu pour la chance qu'Il
nous a offerte !
S'attribuer le mérite
de sa bonté
La pire arrogance de toutes est celle qui nous fait dire : " Voyez comme
je suis bon ! Je fais ce qu'il fallait faire ! "
Quelqu'un vient nous dire : " Voyez mes immenses mérites ! J'avais
une très forte envie de me couper le nez. C'était une envie terrible,
incoercible. J'étais là, tenant mon rasoir devant mon nez. Je
menais un combat sans merci contre moi-même. Finalement, j'ai pu surmonter
ce désir et j'ai jeté le rasoir le plus loin possible. Ne suis-je
pas un homme merveilleux ? "
" Vous êtes fier de vous ? Vous n'êtes rien ! Vous n'avez fait
que ce qui est bon pour vous ! "
C'est comme quelqu'un qui s'enorgueillit d'être empli de bonté.
Il ne s'est pas détruit par la corruption ; il n'a pas perdu son temps
; il ne s'est pas mis en colère ; il ne s'est vengé de personne.
De quoi se glorifie-t-il ? Il a simplement évité de se faire du
mal !
Imaginons un jeune homme poursuivant des études universitaires. Il passe
son temps à boire, se couche tard, néglige complètement
ses études et se trouve finalement en situation d'échec. Son père
est désespéré et conclut un accord avec son fils : "
Si tu réussis à avoir la moyenne à tes examens, je t'offrirai
une BMW. " Le garçon a tellement envie de la voiture qu'il se hâte
de boucler ses révisions et obtient la moyenne.
Un jour qu'il l'aperçoit au volant de sa BMW, un camarade s'exclame :
" Super ! Comment as-tu fait pour recevoir une voiture comme celle-là
? "
" J'ai été récompensé pour mes succès
universitaires. "
Quoi ? ! Il a travaillé dur pour son propre bénéfice -
pour obtenir une bonne formation ! Bien sûr, la BMW a été
une incitation, mais s'il avait compris la valeur inestimable de l'éducation,
cela aurait suffi à lui seul à le motiver efficacement.
Par les mitswoth, le Tout-Puissant nous donne l'occasion, l'aptitude, l'incitation, et l'ultime récompense.
Quand on fait une mitsva,
on fait quelque chose de bien. Les êtres humains désirent des plaisirs
spirituels ayant un sens.
Par les mitsvot, le Tout-Puissant nous donne l'occasion, l'aptitude, l'incitation,
et l'ultime récompense. Tout ce que nous devons faire, c'est employer
les forces que notre Dieu nous a données pour tirer parti de l'occasion
offerte. Il ne faut donc pas se vanter d'être bon. Remercions plutôt
D.ieu pour le cadeau. Ne nous a-t-il pas, après tout, fait plaisir ?
Accomplissement et potentialités
Un moyen d'éviter une fierté inappropriée consiste à
mettre nos accomplissements en perspective.
Imaginons quelqu'un qui acquiert auprès de la municipalité un
immeuble délabré. Il le fait démolir et revend le terrain
en tant que parc de stationnement à quatre fois le prix qu'il lui a coûté.
Très satisfait de l'opération, il ne cesse de vanter ses talents
d'homme d'affaires. Jusqu'à ce qu'il apprenne que son acheteur a revendu
l'endroit au promoteur d'un centre commercial pour cent fois plus !
Comment notre homme se sent-il ? Continuera-t-il de glorifier son sens des affaires
?
Quand nous éprouvons de la fierté parce que nous faisons la charité,
honorons nos parents, ou apprenons la Torah, nous sommes comme l'homme qui se
vante d'avoir vendu le terrain comme parc à voitures. Mais si nous nous
examinons pour ce que nous sommes vraiment et réfléchissons à
ce que nous " aurions pu " accomplir, nous nous apercevons que nos
accomplissements ne sont rien d'autre qu'une goutte d'eau dans la mer. Loin
d'en être fier, nous en ressentons du regret.
Faut-il prendre du plaisir à ce qu'on a fait ? Bien sûr ! Mais
pas jusqu'à en devenir prétentieux et arrogant - et à oublier
que l'on peut faire beaucoup plus. Mettons nos accomplissements en perspective
et ne cessons jamais de nous demander avec insistance si nous n'aurions pas
pu faire davantage. On ne peut jamais être sûr de n'avoir fait plus
qu'une infime fraction de ce qu'on aurait pu faire.
Produire des efforts,
ou compter sur D.ieu
Bien que D.ieu soit à l'origine de tout ce qui survient dans le monde,
le système qu'Il a installé contient pour nous l'obligation de
déployer des efforts. Entre cette toute-puissance de D.ieu et les devoirs
de l'homme, l'équilibre est difficile à découvrir. Nous
devons travailler pour un gagne-pain, mais savoir en même temps que c'est
D.ieu qui le fournit. S'imaginer qu'il suffit d'un travail acharné pour
devenir riche revient à admettre qu'il existe d'autres dieux.
La question qui se pose est de savoir quelle doit être l'importance de
l'effort à fournir au regard de celle de la confiance à avoir
en D.ieu pour qu'Il le fasse prospérer. On appelle cela en hébreu
hichtadlouth par opposition au bita'hone. Si le Tout-Puissant veut que je devienne
riche, je deviendrai riche. S'Il me veut pauvre, je serai pauvre. Quel est mon
rôle dans cette alternative ?
L'importance précise de l'effort diffère de l'un à l'autre.
Un effort qui convient à une personne peut être totalement inapproprié
chez une autre. Tout dépend du niveau de la confiance portée par
chacun en D.ieu.
Un effort qui convient à une personne peut être totalement inapproprié chez une autre.
Prenons l'exemple de l'achat
d'un billet de loterie. Pour celui qui considère un tel billet comme
une absurdité, disant : " Il faut que je travaille durement, c'est
ainsi que je gagnerai ma vie ! ", un tel achat ne représentera pas
pour lui un effort honnête. Il y aura de fortes chances pour que cela
ne donne rien.
Mais il y a celui qui dit : " Le Tout-Puissant dirige ce monde. Cependant,
si je veux devenir millionnaire, je ne peux pas m'asseoir simplement en attendant
que le facteur m'apporte le chèque. Je dois donner au Tout-Puissant un
moyen de me l'envoyer. Et un billet de loterie est un bon moyen ! " Pour
cette personne, son achat représente un effort approprié.
Une troisième personne dira : " Le Tout-Puissant dirige ce monde.
Il n'a pas besoin que j'investisse de l'argent dans l'achat d'un billet de loterie
pour faire de moi un homme riche. Je vais prier et étudier la Torah et
D.ieu s'occupera de mes besoins. " Cette personne, si elle perçoit
vraiment avec une telle évidence la mainmise de D.ieu sur le monde,
et si elle sait qu'il n'existe aucune corrélation directe entre l'effort
et la réussite, n'aura même pas besoin d'acheter de billet.
Relisons l'histoire du séjour de Joseph en prison. Au chapitre 40 de
la Genèse, Joseph est emprisonné en Egypte avec le maître
échanson de Pharaon. Comme le maître échanson doit être
prochainement libéré, Joseph lui demande de solliciter sa libération
auprès de Pharaon. Le Talmud indique que la faute de Joseph, qui a commis
l'erreur de compter sur le maître échanson, lui vaudra de rester
en geôle deux ans de plus. Comme il est écrit : " Heureux
l'homme qui croit en D.ieu, et non en de vaines poursuites " (Psaumes
40, 5).
Qu'est-ce que cela veut dire ? Joseph n'était-il pas un tsaddiq et ne
croyait-il pas en D.ieu de tout son cœur ? !
Si vous ou moi avions demandé au maître échanson d'intervenir,
cela aurait été approprié. Mais la compréhension
par Joseph du pouvoir absolu de D.ieu était si intense, que l'utilisation
de tous autres moyens que ceux déployés par Lui pour obtenir sa
libération était une erreur. Pour Joseph, solliciter le maître
échanson était aussi absurde que s'agripper à de la paille
pour ne pas se noyer.
Faut-il, dans ces conditions acheter un billet de loterie ? L'intensité
de l'acte personnel dépend du niveau de perception que l'on a du rôle
de D.ieu dans le monde. C'est ce qui déterminera la position de l'effort
sur notre échelle personnelle par rapport à la confiance en D.ieu.
Un effort approprié
même sans résultats directs
Mon oncle, Rabbi Avraham Weinberg, de mémoire bénie, qui est devenu
plus tard le Slonimer Rebbe, habitait en Erets Yisrael pendant la première
Guerre Mondiale. A cette époque, la situation dans le pays était
si catastrophique que certains Juifs mouraient vraiment de faim. Mon oncle vivait
à Tibériade, où il était presque impossible de gagner
sa vie. Aussi dit-il à un ami : " Nous allons faire un effort raisonnable.
Marchons d'un bout à l'autre de la place du marché, puis en sens
inverse ! "
Ils descendirent jusqu'au marché, et ils le traversèrent sur toute
sa longueur. Alors qu'ils en revenaient, quelqu'un s'approcha de l'ami de mon
oncle et offrit de lui vendre de la marchandise en gros. Personne en revanche
ne vint aborder mon oncle, qui rentra à la maison pour étudier
la Torah. Arrivé chez lui, il vit un Arabe qui l'attendait avec trois
sacs de blé. L'Arabe indiqua qu'il devait quitter la ville et qu'il avait
besoin de quelqu'un à qui confier son blé. Il donna le blé
à mon oncle et lui dit : " Vends-le pour moi, et tu recevras un
pourcentage. " Un revenu instantané !
En racontant cette histoire, mon oncle disait : " Les gens pourraient penser
que le fait d'aller au marché a aidé mon ami, mais pas moi. Ce
n'est pas vrai. Vous n'avez pas à dire au Tout-Puissant quand et où
Il doit répondre à votre effort. Vous faites un effort - et le
Tout-Puissant procure des résultats. "
Il faut que nous fassions un effort raisonnable. Au niveau où se situait
mon oncle, la traversée du marché représentait un effort
suffisamment raisonnable.
Un effort
illimité pour les mitsvot
Quand il s'agit de mitsvot, quel effort devons-nous déployer ? Un effort
illimité.
Le Talmud (Avoth 5, 26) enseigne : " lepoum tsa'ra agra - "selon l'effort
est la récompense". " Cela signifie que chaque effort que l'on
produit en vue d'une mitsva est récompensé. Cela fonctionne à
tous les coups ! Même s'il nous semble que nous n'atteindrons jamais notre
but, nous n'avons rien à perdre à essayer. Et on ne sait jamais…
le Tout-Puissant fera peut-être un miracle pour nous aider à accomplir
ce qui semble impossible.
La Torah raconte l'histoire de Batya, la fille de Pharaon, qui a trouvé
Moïse flottant dans un panier sur le Nil. Elle étendit instinctivement
sa main pour sauver l'enfant, bien que le panier flottât loin dans le
fleuve et qu'elle se trouvât sur la berge. D.ieu récompensa son
effort, et le bras de Batya se prolongea miraculeusement de façon qu'elle
puisse atteindre Moïse (Exode 2, 5 et Rachi).
Pourquoi Batya a-t-elle étendu son bras alors qu'il semblait impossible
qu'elle pût attraper Moïse ? A-t-elle fait un effort inapproprié
et a-t-elle spéculé sur la venue d'un miracle ?
Elle n'a spéculé sur rien de tel. Elle a vu un bébé
dans le fleuve et a étendu instinctivement son bras pour le sauver. Ce
fut un réflexe conditionné de secours. Si l'on voit un enfant
courir sur la chaussée à l'approche d'une voiture, on étend
son bras même s'il est très éloigné. On a peur pour
lui, et donc on réagit. Et D.ieu a récompensé le geste
de Batya par un miracle qui l'a aidée à parvenir à ses
fins.
Il faut travailler à l'intérieur du système, parce que D.ieu n'aime pas faire des miracles si ce n'est pas indispensable.
Quand il s'agit d'accomplir
des mitsvot, il n'existe aucune limite à l'importance de l'effort à
fournir. Dans le cas de Batya, elle ne disposait que d'un instant pour réagir,
et tout ce qu'elle pouvait faire était d'apporter des soins. Mais en
général, nous avons besoin de faire appel à notre tête
pour trouver une manière raisonnable d'arriver au but. Il faut travailler
à l'intérieur du système, parce que D.ieu n'aime pas faire
des miracles si ce n'est pas indispensable.
Il faut s'accrocher, garder la tête froide - et le Tout-Puissant aidera
à découvrir une solution.
Des niveaux
plus profonds d'humilité
Quand tout a été dit et a été fait, il existe quelques
signes permettant de savoir si l'on a observé la mitsva de " ne
pas croire en d'autres dieux " :
- Si l'on a acquis de la modestie.
- Si l'on ne se bat plus avec son ego.
- Si l'on comprend bien que tout est un don gratuit.
- Si l'on se rend compte que l'on n'a, en définitive, aucun pouvoir indépendant.
Le Talmud enseigne qu'il existe trois niveaux d'humilité - c'est-à-dire
trois niveaux par lesquels nous comprenons qu'il n'existe dans le monde aucun
autre pouvoir que celui de D.ieu.
Le roi David représente un de ces niveaux. Il disait : Ano'hi tolaath
welo ich - " je suis un ver, et non un homme. " David se voyait lui-même
comme une humble créature vivante.
Le ver est sans défense, sauf que D.ieu lui donne le pouvoir de se déplacer.
Comme roi, David avait à élaborer des stratégies et à
prendre des décisions en utilisant son cerveau. Il se considérait
donc encore comme " quelque chose ", même si ce " quelque
chose " n'était qu'un humble ver.
Abraham s'est situé
à un niveau plus élevé d'humilité. Il disait de
lui-même : Ano'hi 'afar waèfèr - " je suis poussière
et cendre ". Abraham reconnaissait que son rôle dans ce monde-ci
consistait à enseigner aux gens qu'il existe un Dieu qui les aime. Il
se voyait comme une sorte de tuyau d'écoulement, comme un objet inerte.
Il était poussière, tout en assumant une certaine fonction d'intermédiaire,
pour insignifiante qu'elle fût.
Mais le plus haut niveau
d'humilité a été celui de Moïse, qui a dit : Vena'hnou
ma - " Nous ne sommes rien. " Il a atteint le niveau ultime de
compréhension qui lui a fait prendre conscience qu'il n'existe rien d'autre
que D.ieu. Ni un ver, ni même un grain de poussière. Moïse
a reçu la Torah de D.ieu, et l'a transmise au peuple juif. Par conséquent,
Moïse ne pouvait pas permettre à sa propre personnalité de
corrompre la vérité pure du message de la Torah.
Un but primaire dans la vie est de parvenir à comprendre qu'il n'existe
aucun pouvoir hors celui de D.ieu, et que tout ce que nous avons accompli n'a
été fait que parce que D.ieu l'a voulu. C'est là l'essence
de " ne pas croire en autres dieux ". Et c'est une mitsva " permanente
" parce que nous subissons en permanence le désir du yètsèr
hara' qui s'active contre nous.
Puissions-nous avoir assez de force et de clarté d'esprit pour le surmonter
!
" Tu te souviendras de D.ieu ton Dieu, parce qu'il te donne de la force
pour obtenir du succès " (Deutéronome 8, 18).
Traduit de l'anglais
par Jacques KOHN