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La différence entre le "laisser" et le "donner".

Imaginons un instant qu'une entreprise ayant réalisé d'importants bénéfices ait décidé de faire don d'une partie de ce qu'elle possède à divers organismes charitables.

Le comptable se mettra aussitôt à la recherche des bénéficiaires proposés afin de s'assurer que ce qui leur sera versé procurera des déductions fiscales ; le service des relations publiques annoncera la donation dans toute la presse et préparera un gala auquel assisteront de nombreux journalistes.

Le service commercial se préparera à montrer les plus récents produits de l'entreprise à ceux qui assisteront à cette manifestation, tandis que le PDG saisira l'occasion pour informer les actionnaires que l'entreprise a doublé ses bénéfices et dépassé toutes les prédictions des analystes.

Essayons maintenant d'imaginer une autre entreprise, tout aussi ambitieuse et performante, qui désirerait distribuer aux pauvres les excédents de nourriture de sa cafétéria. Elle fera publier une petite annonce, le personnel de la cuisine sera invité à emballer la nourriture excédentaire dans des sacs, et les nécessiteux de la ville feront la queue pour recevoir une portion de nourriture. Aucune tentative ne sera faite pour vérifier que les bénéficiaires sont effectivement indigents, car on supposera que ce sera la raison de leur présence. Et la presse ne sera pas invitée à un événement aussi banal.
 

PEAH ET TSEDAQA

" La Péah respecte le principe d'universalité, alors que la Tsedaqa dépend du bon vouloir du donateur"

Ces deux actions se présentent l'une et l'autre comme des gestes de tsedaqa (" charité ").

Cependant, les buts poursuivis par ces deux sociétés et les moyens mis en œuvre sont très différents.

La société A considère son acte de charité comme une occasion tout à la fois d'annoncer sa générosité et d'attirer l'attention du public sur ses activités, tandis que l'entreprise B veut simplement alléger le fardeau porté par les pauvres.

L'entreprise A choisit soigneusement ses donataires, tandis que l'entreprise B attribue ses largesses à n'importe qui dès lors qu'il se présente lui-même comme un pauvre.

Nous pouvons voir la même différentiation, dans son essence, dans la description que donne la Torah aux institutions de Péah et de Tsedaqa. La mitsvah de Péah fait obligation à l'agriculteur de " laisser " l'extrémité de son champ pour que les pauvres viennent y cueillir de sa récolte. De la même manière, il doit abandonner sur le sol tout ce qui est tombé pendant le moissonnage. Il est interdit à l'agriculteur d'intervenir en faveur d'un pauvre déterminé et de lui donner la Péah. En revanche, la mitsvah de Tsedaqa (" charité ") n'oblige pas à distribuer une somme fixe. Elle est laissée à la discrétion du donateur, qui peut choisir comme il l'entend ses bénéficiaires.

Dans la parachath Emor, la Torah stipule la mitsvah de Péah au milieu de sa description des jours de fête.

Outre l'étrangeté de cette juxtaposition, le précepte lui-même paraît superflu, car il avait déjà été prescrit dans la précédente paracha. Pourquoi la Torah le répète-t-elle, et pourquoi précisément à cet endroit ?
 

SE FAIRE L'INSTRUMENT DESINTERESSé DE LA VOLONTé DIVINE

" La charité est un besoin inné que l'on effectuerait même sans ordre divin"

Nos Maîtres, dans Torat Kohanim, expliquent que " quiconque donne la Péah au pauvre est considéré comme s'il avait apporté un sacrifice au Temple ".

Cette analogie nécessite une explication et elle ne semble pas répondre aux questions ci-dessus.

Le Maharal de Prague, Rabbi Yehouda Loew, explique que quand un homme apporte un sacrifice, il déclare que son argent appartient à D.ieu et qu'il est simplement le serviteur de D.ieu apportant Son sacrifice comme il en a l'obligation.

De la même manière, la Péah est un cadeau exigé pour le pauvre quand on moissonne. Il ne constitue pas un acte de " donner ", puisque l'agriculteur fait simplement la volonté de D.ieu et " laisse " l'extrémité de son champ.

La charité, en revanche, est un besoin humain inné que l'on exécuterait même s'il ne résultait pas d'un ordre divin. Ainsi, celui qui accomplit un acte de charité accomplit en fait sa propre volonté ainsi que celle de D.ieu - comme la société A qui cherche à retirer un avantage de ses donations - tandis que celui qui fait abandon de l'extrémité de son champ assujettit sa volonté à celle de D.ieu en déclarant que l'extrémité de son champ ou les chutes tombées sur le sol appartiennent aux pauvres. Cette forme de charité est analogue aux désirs altruistes de la société B lorsqu'elle veut donner aux pauvres tous ses restes de nourriture.

Nous pouvons comprendre maintenant pourquoi la Torah a légiféré sur cette mitsvah dans le même contexte que celui des fêtes. La mitsvah de Péah est mentionnée aussitôt après Chavou'oth, fête au cours de laquelle sont apportés les premiers fruits de la récolte et à l'occasion de laquelle est énoncé pour la première fois le concept d'offrir à D.ieu un " sacrifice " prélevé sur un produit.

La Torah a entendu formuler cette mitsvah tout d'abord dans la parachath Qedochim car elle est un acte de bonté humaine comme le sont toutes celles qui, contenues dans cette paracha, font intervenir des sentiments liés à la vie en société. Mais elle a aussi voulu souligner l'aspect spécifique du geste de " laisser ", qui distingue Péah de la charité normale comme étant un accomplissement désintéressé de la volonté de D.ieu.
 

AU-DELà DU DROIT STRICT

Le propriétaire ne doit tirer aucun bénéfice de l'acte de "donner"

L'une des incidences halakhiques de ce concept est que, lorsqu'il existe un doute concernant la propriété d'un produit tombé, il appartient au pauvre et non au propriétaire du champ.

En règle générale, lorsqu'il s'élève un doute sur la propriété d'un objet, c'est à celui qui le revendique d'apporter des preuves contre son détenteur.

Dans notre cas, c'est le propriétaire du champ qui détient le produit tombé, mais malgré cela il sera attribué au pauvre, puisque la Torah met l'accent sur le fait qu'il doit " laisser " le produit, ce qui veut dire qu'il n'a le droit de faire valoir sur lui aucune prétention (Torat Kohanim, Qedochim 19, 9 ; Malbim ibid.).

Ainsi donc, la halakha renforce les droits du pauvre et montre que le propriétaire n'a le droit de tirer aucun bénéfice de l'acte de " donner ". Il est au contraire celui qui " laisse ", comme l'y oblige la Torah, et c'est cela le vrai sacrifice de la charité.

 

Traduit et adapté par Jacques KOHN


A PROPOS DE L'AUTEUR
le Rabbin Yoël DOMB
Le rabbin Yoël Domb a été diplômé par le JCT (Center for Business Ethics and Social Responsibility - " Centre pour l'éthique dans les affaires et pour la responsabilité sociale ") et il appartient à la faculté du JCT Pari Midrach. Boursier du Centre pour l'année universitaire 2000-2001, il effectue actuellement des recherches sur les sujets d'éthique dans les affaires contenues dans la loi juive et il prépare un cours destiné à faciliter l'enseignement de ces sujets dans les yechivoth.
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