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« Et si la maison est trop peu nombreuse pour un agneau, que ton voisin se joigne à toi… »

A la veille de la fin spectaculaire et miraculeuse de ce qui a été notre premier exil, nos ancêtres ont été invités à accomplir un acte de bonté, du genre de ceux qui caractériseront plus tard les Juifs : « Et si la maison est trop peu nombreuse pour un agneau, que ton voisin se joigne à toi… » (Chemoth 12, 4). Il ne pouvait pas s’agir d’une sorte d’aumône faite à un pauvre, puisque l’on ne connaît pas la situation de fortune de ses voisins. Contrairement à d’autres dons de nourriture stipulés par la Torah, à ceux de la Chemita ou du jubilé, on ne nous a pas dit que le geste prescrit s’adressait au pauvre. Il s’est donc agi d’un ordre de Dieu concernant notre façon d’user de nos richesses et de nos biens. Mon agneau doit être partagé avec mon voisin, quel que soit son niveau de vie, simplement parce que ce fractionnement est l’un des buts pour lesquels la richesse est gagnée, créée ou nous est accordée. C’est peut être précisément parce que nous avons beaucoup de mal à accepter cette idée de partage comme un but de l’octroi de nos richesses que nous cherchons à définir nos actes charitables comme des expressions de notre pitié ou de notre bonté. Il s’agit là cependant, insiste la Torah, à la fois d’une mitswa active (« ouvrir, tu lui ouvriras la main ») et d’une interdiction (« et tu ne fermeras pas ta main à ton frère pauvre ») (Devarim 15, 7 et 8).

L’une des façons d’accomplir ces deux mitswoth est le ma‘assèr kessafim, la dîme financière qui est une obligation distincte des activités charitables gérées par la communauté. Pour certaines autorités, il s’agit là d’une extension du prélèvement de la dîme sur les fruits, les produits alimentaires et le bétail tel qu’il est prescrit par la Torah. Pour d’autres, il ne s’agit que d’une tradition séculaire adoptée par les Juifs achkénazes et donc obligatoire pour leurs descendants. Cette pratique, quoi qu’il en soit, s’est généralisée dans l’ensemble du monde juif (Techouvoth ‘Hatham sofèr, Yoré dé‘a 231).

Tout revenu est soumis à ma‘assèr, quelle qu’en soit la source, y compris les gains fortuits comme les cadeaux, les successions ou les produits des loteries. La dîme est prélevée après déduction de toutes les dépenses engagées pour créer ou gagner ce revenu. Celui ci est calculé après paiement de l’impôt. Cependant, les paiements effectués au profit des organismes de sécurité sociale ne peuvent pas être déduits, étant donné qu’ils représentent des produits d’épargne ou des investissements. De la même manière, toutes les dépenses reconnues par les administrations fiscales comme des dépenses déductibles ne sont pas nécessairement acceptées comme telles pour la détermination de l’assiette du ma‘assèr. C’est ainsi que les frais de déplacement engagés à titre professionnel ne doivent pas correspondre à ce qu’il y a de plus cher billet d’avion en première classe ou hôtels « 5 étoiles ». Puisqu’ils deviennent à la charge des pauvres, on est tenu de se limiter à des dépenses plus modestes (Rav M. Sternbuch, ‘Am haTorah 2, 5). Il en va de même des petits avantages dont jouissent les cadres et les chefs d’entreprise, même lorsqu’ils sont acceptés par les administrations fiscales (Beith din chel Chelomo, Yoré dé‘a 1). On pourra se référer à l’ouvrage Ma‘assèr kessafim, de Rav Cyril Domb, guide précieux pour déterminer ce qui est imposable comme ma‘assèr et ce qui ne l’est pas. Les Sages de la Michna et du Talmud étaient profondément conscients des subterfuges que les gens pouvaient utiliser pour échapper à leurs obligations en matière de dîme, et il ne faut pas s’imaginer que la nature humaine d’alors était différente de celle d’aujourd’hui.

Etant donné que les ressources économiques sont par définition limitées, nous avons besoin de directives sur la façon de répartir l’argent destiné à la charité. Je n’ai présenté ici qu’un bref résumé de ces indications telles qu’elles sont énoncées dans le Michné Torah, Matenoth ‘Aniyim, chapitres 7 à 10, et dans le Choul‘han ‘aroukh, Yoré dé‘a 247 à 256.

Il semble que l’on puisse faire des dons aux organisations et aux institutions de son choix. Pour les individus, en revanche, la sélection des bénéficiaires n’est pas entièrement libre. On doit donner sans examen préalable à celui qui dit avoir faim, mais l’on peut vérifier les allégations de celui qui demande à être vêtu. Quant au pidyon chevouyim (« rachat des captifs »), c’est une obligation à laquelle on ne peut jamais se soustraire. Cette nécessité, qui a existé tout au long de l’histoire, reste une réalité dans la vie juive. On ira jusqu’à vendre une synagogue pour financer ce rachat. La logique en est simple : Les réfugiés et les captifs partagent toutes les tristesses et toutes les souffrances des pauvres, avec en plus la perte de leur liberté. On notera dans le Michné Torah (8, 13) une halakha qui stipule nous avons l’obligation de racheter un captif même lorsque sa servitude a eu lieu par sa faute : « Celui qui a emprunté de l’argent aux païens avec l’intention de ne pas rembourser sa dette, nous avons l’obligation de le racheter, y compris une deuxième et même une troisième fois. Mais il est permis, une quatrième fois, de le refuser. Si cependant il y a danger de mort l’obligation subsiste indéfiniment. » Le judaïsme se refuse à ne prêter assistance qu’au pauvre méritant, et nous devons nous montrer charitables même envers les toxicomanes et les paresseux. Il est, certes, légitime d’établir des limites à nos activités charitables, mais on doit accomplir au moins un petit geste envers tous ceux qui nous sollicitent. A défaut d’argent, on leur fournira un conseil ou un témoignage de sympathie. Nos proches parents ont droit à notre charité en priorité, et Rav S.R. Hirsch estime qu’une telle aide doit précéder le recours aux fonds communautaires. Le ‘Aroukh hachoul‘han impose cependant une limitation à l’aide que nous fournissons à nos proches, faute de quoi il ne restera plus rien pour les autres indigents. La fourniture d’un emploi ou d’une aide financière à la création d’une entreprise, nous l’avons déjà dit, sont les formes les plus élevées de charité. Viennent ensuite les dons faits dans la discrétion, qui préservent la dignité et l’amour propre des bénéficiaires. Le Rambam recommande à cette fin le maintien, même de nos jours, de l’institution de péa (« mise d’un coin de nos champs à la disposition des indigents »). Il est également méritoire d’inciter les autres à des gestes charitables.

On observe souvent aujourd’hui, cependant, une méfiance envers les activités charitables au motif qu’elles serviraient à se justifier de ses comportements commerciaux contraires à la morale ou à se les faire pardonner. Est ce là une version juive moderne des « indulgences » papales d’antan (« rémission des péchés contre de l’argent ») ? Le zèle des collecteurs de fonds les entraîne souvent à solliciter ou à accepter des dons souscrits par des gens dont la malhonnêteté en affaires est radicalement opposée aux valeurs de la Torah. On ne mesurera jamais la gravité du ‘hilloul haChem (« profanation du Nom ») résultant de l’acceptation du produit de blanchiments d’argent, de trafics de drogues ou de fraudes fiscales. Les techniques de communication dont on dispose aujourd’hui permettent à un tel ‘hilloul ha-Chem de se répandre au vu et au su de tous.

Il nous faut cependant examiner les opinions qui ont été avancées pour permettre de tels comportements. Il est exact que les responsables des caisses de bienfaisance ne sont pas tenus d’examiner et de vérifier la cacherouth des donateurs. Il en va cependant tout autrement lorsqu’on est en présence d’un voleur notoire ou d’un criminel condamné comme tel. Il faut noter, en outre, que la halakha, qui interdit d’acheter à un voleur, ne défend pas que l’on jouisse de ses biens. On ne peut jamais déterminer avec certitude, en effet, lesquelles de ses possessions ont été volées et lesquelles sont irréprochables. Mais cette distinction était concevable à l’époque où les voleurs jetaient leur dévolu sur des biens, comme le bétail, facilement identifiables. Qu’en est il aujourd’hui où la plus grande partie des actifs possédés par les délinquants est constituée par de l’argent, dont il est impossible de séparer celui qui est cachère de celui qui ne l’est pas ?

Au delà même des questions halakhiques, il reste en tout état de cause les dommages religieux et spirituels causés par un état d’esprit pour lequel la fin justifie les moyens. Saura-t-on mesurer les résultats d’une éducation de Torah reçue dans une institution dont le budget est alimenté, même partiellement, par des fonds d’origine douteuse, et saura-t-on préserver la sainteté des communautés dont les organisations charitables sont financées par de l’argent sale ?

 

Traduction et adaptation de Jacques KOHN


A PROPOS DE L'AUTEUR
Méir Tamari
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