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Placements boursiers et Hala'ha (3ème partie): le 'hamets a Pessa'h

Que dois-je faire si je possède des actions dans une société faisant commerce de 'hamets ? Dois-je m'en débarasser avant Pessa'h ?

Dans le premier chapitre de cette étude, nous avons examiné la question générale du statut de propriétaire possédé par l'actionnaire. Comme nous l'avons expliqué, l'un des points de vue en présence considère l'actionnaire comme un propriétaire de l'entreprise et de ses actifs - comme un associé ordinaire. L'autre point de vue perçoit l'actionnaire comme une sorte de créancier - il a réalisé un investissement et en recevra les fruits en retour, mais le vrai propriétaire de l'entreprise est quelqu'un d'autre : une structure de contrôle, la direction, ou peut-être même la société elle-même, reconnue comme une personne morale par la Hala'ha comme elle l'est par la loi séculière.

Nous avons aussi appelé l'attention sur les nombreux points où l'actionnaire ressemble à l'associé " silencieux " (nothèn 'isqa), personnage dont le statut hala'hique est bien établi. Nous avons conclu que s'il existe beaucoup d'opinions indulgentes, les autorités contemporaines les plus éminentes ne sont pas disposées à créer, au plan de la Hala'ha, une exemption globale de responsabilité en faveur de l'actionnaire, mais elles le considèrent dans une certaine mesure comme un associé.

Nous avons aussi indiqué que les pouvoirs de l'actionnaire minoritaire et son statut légal selon la loi séculière en tant que propriétaire tendant à devenir plus importants que le croient beaucoup de gens. Cependant, même les opinions rigoureuses reconnaissent l'importante distance qui sépare l'actionnaire des opérations réalisées par la société, et cette distance peut conduire à diverses solutions empreintes de souplesse dont chacune devra faire l'objet d'un examen spécifique.

Le deuxième chapitre s'est concentré sur les problèmes d'intérêt (ribith) interdit entre Juifs.
Ce chapitre-ci portera sur le problème posé par la possession d'actions d'une entreprise à qui appartient du 'hamets pendant Pessa'h.
 

DéFINITION DU PROBLèME

Le discussion hala'hique en ce qui concerne les parts de société dans une entreprise possédant du 'hamets aux environs de Pessa'h s'articule autour de trois interdictions distinctes :

1. Bal yiraé ouval yimatsé : le Torah interdit de posséder du 'hamets pendant Pessa'h, même si nous n'en retirons aucun profit.

2. Le Torah interdit de retirer un profit (issour hanaa) du 'hamets pendant Pessa'h, même s'il ne nous appartient pas.

3. Les rabbins interdisent de retirer un profit d'un produit 'hamets qui a appartenu à un Juif pendant Pessa'h et dont il ne s'est pas correctement débarrassé.
Nous examinerons chacune de ces interdictions dans une section séparée.
 

BAL YIRAE - INTERDICTION DE POSSEDER DU 'HAMETS

Le Torah nous ordonne : " Pendant sept jours, qu'il ne soit pas trouvé de levain dans vos maisons… " (Exode 12, 19). Ce commandement a un " frère jumeau " : " … et l'on ne verra pas chez toi de 'hamets, et l'on ne verra pas chez toi de levain dans toutes tes limites " (Exode 13, 7).
Bien que, selon certaines opinions, il puisse exister des cas où l'on " trouve " du 'hamets sans en " voir ", ces deux interdictions, en règle générale, se chevauchent et on les traite comme si elles n'en formaient qu'une seule : bal yiraé ouval yimatsé. Il n'est permis ni de " voir " ni de " trouver " du 'hamets.

Ces interdictions concernent au premier chef le 'hamets que l'on " possède ".

Etant donné la précision apportée par ces textes selon laquelle l'interdiction de " trouver " et celle de " voir " s'appliquent à ce qui est " chez toi ", elles concernent au premier chef le 'hamets que l'on " possède ". Celui qui n'appartient pas à un Juif n'est pas visé par l'interdiction, et celui qui appartient à un Juif est visé par celle-ci même quand il est n'est pas dans sa propre maison. (Certains Gueonim ont considéré, il est vrai, que le 'hamets d'un Juif se trouvant dans le domaine d'un non-Juif n'est pas interdit - voir Roch - Pessa'him I, 4. Cette opinion est cependant rejetée par les Richonim).
 

La définition de la propriété, en ce qui concerne le 'hamets, comporte quelques légères différences avec celle applicable à d'autres lois, d'où des conséquences à la fois plus rigoureuses et dans une certaine mesure plus indulgentes.

Voici trois conséquences plus rigoureuses de la définition de la " propriété " applicable au 'hamets :

1. Dans beaucoup de cas, lorsqu'un objet est soumis à un issour hanaa (" interdiction d'en tirer profit "), la conséquence en est une dépossession : l'objet n'appartient plus à son propriétaire. Cependant, le Talmud nous enseigne : " Deux choses ne sont pas dans la possession d'une personne, et pourtant l'Ecriture les a faites comme si elles étaient en sa possession : une fosse dans le domaine public, et du 'hamets à partir de midi [la veille de Pessa'h - quand commence l'interdiction d'en retirer un profit] " (Pessa'him 6b).

2. Le simple fait d'être responsable pour un objet ne signifie pas toujours qu'on en est le propriétaire.
Dans le cas du 'hamets, la responsabilité d'un Juif est considérée comme une conséquence du droit de propriété. En ce qui concerne le 'hamets, la responsabilité est considérée comme une propriété le'houmra, la propriété sans responsabilité et la responsabilité sans propriété étant l'une et l'autre interdites (voir Choul'hane 'arou'h - Ora'h 'hayim 440, 1). A propos des cas où la responsabilité n'est pas considérée comme une pleine propriété, voir Ora'h 'hayim 649 (loulav), Evène ha'ézèr 28, 1 (Qiddouchin). A propos du cas où, par une application bienveillante, elle n'est considérée que sous l'angle de la responsabilité, voir Yoré Dé'a 320, 7 (be'hor). A propos du cas où elle est considérée comme une propriété dans les deux sens, rigoureux et indulgent, voir Yoré Dé'a 168-9, 21 (ribith). Un cas contesté : Ora'h 'hayim 246, 4. Le 'hamets est le plus rigoureux de ces cas.

3. Ce dont un Juif est copropriétaire est considéré comme lui appartenant pleinement, et l'associé non juif est perçu comme en ayant été exproprié. " Rava a enseigné : Le heqdèch (" consécration au Temple "), le 'hamets et le chi'hrour (" affranchissement d'un esclave ") exproprient les liens " (Yevamoth 46a).

Cependant, certaines autorités associent à ces cas une indulgence. Le 'Hatham Sofèr écrit (Ora'h 'hayim 63) : " Puisque le 'hamets n'est pas réellement dans la possession d'une personne et que l'Ecriture fait comme s'il était en sa possession, [il s'ensuit qu'une] simple manifestation de volonté (guilouï da'ath) indiquant qu'elle n'en veut pas est suffisante. " Et le Michna beroura (448, 17) de noter : " Puisque le 'hamets, après le moment où il devient interdit, n'est en aucun cas en sa possession, sauf que l'Ecriture a fait comme s'il était en sa possession pour lui rendre applicable la transgression dans le cas d'une possession de la moindre quantité, cela suffit, du moment qu'il a de tout façon manifesté sa volonté (megalei da'athei) qu'il n'en veut pas et qu'il l'a fait sortir de son domaine. " (Ces accommodements, en définitive, s'appuient sur notre aptitude à rendre " nul " le 'hamets. Voir le Ran sur le Rif au début de Pessa'him, s.v. oumahou)

Quand nous avons examiné, dans le chapitre précédent, l'applicabilité de l'interdiction de l'intérêt à une société commerciale moderne, nous avons trouvé beaucoup de points de vue différents sur la question. Si certaines des opinions bienveillantes étaient basées sur une manière particulière de considérer les sociétés, beaucoup d'autres l'étaient sur des manières inédites de scruter l'interdiction de l'intérêt en général.
 

AUTOUR DU STATUT ET DU POUVOIR DE L'ACTIONNAIRE

Dans l'ensemble, nous trouvons moins d'approches innovatrices sur l'interdiction de posséder du 'hamets à Pessa'h. La plupart des discussions se développent autour de la question générale de savoir si un actionnaire est un associé, auquel cas les actifs de l'entreprise appartiennent aux actionnaires, ou s'il n'est qu'un simple créancier.

Comme cela a été le cas pour l'intérêt, une responsa innovatrice - et indulgente - a été écrite par le Rabbin Yits'haq HaLévi [Ittinga] (Mahari HaLévi II, 124). Il commence par l'examen de la question du 'hamets qui a appartenu à un Juif pendant Pessa'h, mais il affirme ensuite : "Il semble que [les actionnaires] ne sont coupables d'aucune transgression en ne vendant pas leurs parts sociales. "
Rav Ittinga continue alors en assimilant le'hamets appartenant à une société au 'hamets " dans la bouche d'un serpent ", qu'il n'est pas nécessaire d'aller chercher au loin pour le détruire (Pessa'him 10b).

Nous pouvons comprendre cett Hala'ha de l'une des deux manières suivantes :
- Le 'hamets " dans la bouche d'un serpent " appartient encore au propriétaire, ce malgré quoi il n'est pas obligé de le détruire, puisqu'il n'y a pas accès actuellement. Cette approche est semblable à celle définie par Maïmonide sur la Torah, dans Exode 12, 19.
- Le 'hamets " dans la bouche d'un serpent " est déjà détruit, puisque le propriétaire ne pourra pas le récupérer.

Selon la première analyse, le Mahari HaLévi dirait qui même si le 'hamets appartient réellement aux actionnaires, cette propriété est sans aucune conséquence quant à l'interdiction de bal yiraé puisque cette interdiction nécessite un certain degré d'accès ou de pouvoir de contrôle.
Selon la seconde analyse, rav Ittinga dirait que, de même que la difficulté qu'il y a à récupérer le 'hamets dans la bouche du serpent démontre qu'il n'appartient plus au propriétaire de jadis, de même l'impossibilité légale pour un actionnaire d'appréhender " son " 'hamets dans l'inventaire de l'entreprise démontre de manière convaincante que ses actifs ne lui appartiennent en aucune façon.
Rappelons ce que le Mahari HaLévi a écrit à propos de l'intérêt : l'argent d'une banque n'appartient pas aux actionnaires.

Cet article, dans lequel le Rabbin Weingort conclut que les actifs de la société n'appartiennent pas aux actionnaires, est devenu un document de référence

On a posé la même question au Rabbin David Tsvi Hoffman (1843-1921) (Melamed LeHoïl - Ora'h 'hayim 91), toujours au sujet du 'hamets après Pessa'h. Il a révélé que cette question avait été posée lors d'un examen au Rabbiner Seminar fuer das orthodox Judentum du rav Ezriel Hildesheimer. Tous les étudiants avaient opiné en faveur de la solution indulgente, et le Rabbin Hildesheimer (1820-1899) avait noté sur toutes les réponses qu'elles étaient correctes. Le Rabbin Hoffman énumère toutes les différentes mansuétudes qui ont été mentionnées par les étudiants, mais nous ne savons malheureusement pas laquelle a été considérée comme décisive par le Rabbin Hildesheimer.

Cela est très significatif puisque la plupart des raisons s'appliquent uniquement au problème du 'hamets après Pessa'h, tandis que le Rabbin Hoffman cherchait à utiliser cette anecdote pour appuyer une décision indulgente même pour le 'hamets pendant Pessa'h. En fin de compte, il répond à la question en indiquant qu'il n'est pas nécessaire de vendre avant Pessa'h les parts sociales que l'on possède dans une entreprise de brasserie si une perte en découlera.

L'un au moins des étudiants du séminaire ne devait pas oublier cette question après l'examen. L'étudiant Chaoul Weingort, qui allait devenir en Suisse, après la guerre, un maître éminent en Torah jusqu'à sa fin tragique dans un accident, a écrit un long article consacré à la Hala'ha en matière de sociétés dont la responsabilité est limitée, imprimé par la suite dans un ouvrage commémoratif Yad Chaoul. Cet article, dans lequel le Rabbin Weingort conclut que les actifs de la société n'appartiennent pas aux actionnaires, est devenu un document de référence cité par beaucoup d'autres autorités.

Il serait intéressant de rechercher si le statut des actionnaires selon la législation sur les sociétés applicable en Allemagne au XIXème siècle était similaire à celui que définissent aujourd'hui la loi israélienne et celle d'autres pays. Il est certain que pour les banques, soumises à une règlementation stricte et dont les actionnaires ne peuvent avoir été que des déposants, il y a lieu de faire une distinction. Cependant, il semble résulter des responses du Rabbin Hoffman en particulier que les actionnaires ont un intérêt réel dans l'affaire.

On a trouvé dans le Cheèlath David du Rabbin David Karlin (1828-1917) une tentative de relier notre question à une étude plus fondamentale sur la nature de l'interdiction du 'hamets. Dans sa responsa, l'auteur examine la décision des Gueonim, mentionnée ci-dessus, qui fait échapper à l'interdiction le 'hamets appartenant à un Juif mais qui n'est pas sur son domaine, et il se demande si cela ne peut pas être une considération supplémentaire pour l'indulgence. Mais en fin de compte il ne trouve pas de motifs suffisants pour être accommodant.
 

UNE PARADE : LA VENTE DU 'HAMETS

Ils permettent cependant l'un et l'autre de vendre les titres que l'on possède en même temps que la vente habituelle du 'hamets.

Comme nous l'avons indiqué dans notre première partie, le Rabbin Weiss (Min'hath Yits'haq III, 1) et le Rabbin Sternbuch (Mo'adim ou-zemanim Vol. III 269, note 1) parviennent l'un et l'autre à la conclusion qu'un actionnaire est un associé, et donc qu'il est interdit de posséder des actions dans une société cotée en Bourse qui possède du 'hamets. Ils permettent cependant l'un et l'autre de vendre les titres que l'on possède en même temps que la vente habituelle du 'hamets.
 

Cet accommodement est significatif dans la mesure où, s'agissant de titres cotés en Bourse, ils sont d'une grande fluidité et leur prix fait l'objet d'une large publicité, de sorte que le caractère évident de subterfuge détenu par la vente du 'hamets est très grand. Contrairement au whisky, par exemple, dont la valeur est élevée mais qui nécessite des connaissances spéciales pour être évalué et négocié, le non-Juif qui achète des titres 'hamets peut facilement se rendre compte s'il vaut la peine de les vendre au lieu de les rétrocéder au Juif. Malgré cela, les considérations indulgentes qui ont conduit certaines autres autorités à permettre de posséder des actions sans autre discrimination ont exercé une influence sur ces décisionnaires pour qu'ils permettent cet évident subterfuge.

Le Rabbin Sternbuch exprime la crainte qu'une telle vente puisse ne pas être valable selon les lois réglementant les marchés boursiers. S'il est vrai que ces lois soumettent chaque vente de valeurs mobilières à des formalités officielles, on m'a assuré de bonne source que le non-respect de ces formalités n'a pas pour effet de rendre nulle la vente, de sorte que cette crainte, semble-t-il, n'est pas fondée. (Cette question rappelle la célèbre discussion entre le 'Hatham Sofèr (1762-1839) et le Rabbin Barou'h Frenkel (1760-1828) - le Barou'h Ta'am - à propos du stempel, ou timbre fiscal. Le Rabbin Frenkel craignait que la vente du 'hamets fût nulle, aucun timbre fiscal n'étant apposé sur les récipients contenant de l'alcool. Mais le 'Hatham Sofèr (I, 113) expliqua que cela ne signifiait pas pour autant que les autorités du pays auraient refusé de reconnaître la validité de la vente, mais qu'elles étaient disposées à exempter cette vente particulière de la pose du timbre.)

Un problème distinct s'est posé à propos de la validité même de la vente. A première vue, il semblerait que la vente que je fais à mon rabbin, réalisée selon les formes hala'hiques appropriées (kinyane), soit au moins aussi valable que mon acquisition à l'origine de mes valeurs boursières, réalisée selon toutes probabilités par un simple appel téléphonique à un courtier en valeurs non juif que je ne connais même pas.

Considérer le bordereau du courtier comme un chetar revient à dire que mes titres ne sont pas un avoir mais simplement un crédit.

Cependant, la véritable situation est un peu plus compliquée. Cette opération d'achat a été indiscutablement réalisée selon un mode de transfert de propriété universellement reconnu dans le commerce, une sitoumta. La Hala'ha reconnaît sans aucun doute une telle acquisition. (Voir Baba Metsi'a 74a, Choul'hane 'arou'h - 'Hochèn michpat 201). Quant à la vente à un rabbin, elle est certainement adéquate pour des marchandises ordinaires, mais elle peut poser problème si nous considérons le bordereau établi par le courtier comme un chetar ou instrument contractuel écrit. La vente d'un contrat écrit est soumise à des restrictions particulières, et il ne suffit plus de soulever le stylo ou le mouchoir du rabbin à titre de kinyane (Choul'hane 'arou'h - 'Hochèn michpat 66).

Il semble cependant que cela non plus ne soit pas un obstacle. En dernière analyse, considérer le bordereau du courtier comme un chetar revient à dire que mes titres ne sont pas un avoir mais simplement un crédit. Or, selon cette approche, ainsi que nous l'avons souligné, le problème de 'hamets ne se pose pas vraiment, puisqu'un créancier ne possède pas le 'hamets de son débiteur et qu'il n'a certainement pas à s'en dessaisir.

Il semblerait même plus logique à vendre le 'hamets lui-même appartenant à l'entreprise. Somme toute, si je le possède je peux le vendre, et si je ne le possède pas je n'ai pas à le vendre ! La difficulté qui se posera ici résulte du fait que la société acquerra ou fabriquera d'autres produits 'hamets pendant la fête…

Le plus prudent consiste, semble-t-il, à mentionner explicitement au rabbin que les ventes réalisées par les entreprises possédant du 'hamets sont vendues en même temps que les autres produits 'hamets au moyen de la vente habituelle de Pessa'h.
 

LA RESPONSABILITé (A'HARAYOUT)

Ceux qui considèrent le 'hamets comme appartenant à la société, et non à l'actionnaire, tiennent les locaux de la société comme appartenant aussi à la société, de sorte que cette responsabilité ne crée aucun problème.

On pourrait objecter que même si les actifs d'une société n'appartiennent pas aux actionnaires, ils sont de toute manière sous leur responsabilité. La valeur des actions évolue, à la hausse comme à la baisse, en corrélation avec celle des actifs de la société. Et même si les actions sont à considérer comme un prêt, ce qui est accessoire à un prêt peut être aussi un cas de responsabilité quand il est le seul moyen d'en obtenir le remboursement.

Cependant, cela n'ajoute aucune rigueur supplémentaire, puisque la responsabilité n'est interdite que dans le domaine propre d'un Juif (comme nous le voyons dans le Choul'hane 'arou'h - Ora'h 'hayim 440 et 441). Il en va ici différemment de la possession, qui est interdite en tout lieu, et aussi du 'hamets qui appartient complètement à un non-Juif et que nous pouvons détenir même sur notre propre propriété (Choul'hane 'arou'h - Ora'h 'hayim 440, 2). Ceux qui considèrent le 'hamets comme appartenant à la société, et non à l'actionnaire, tiennent les locaux de la société comme appartenant aussi à la société, de sorte que cette responsabilité ne crée aucun problème.

Cela ressemble au problème de l'assurance. Puisque la compagnie d'assurance devra dédommager la société si le 'hamets de celle-ci vient à être brûlé ou détruit, elle détient une sorte de responsabilité pour le 'hamets. La solution de ce problème, ici encore, consiste à dire que le 'hamets n'est pas en la possession de l'assureur.
 

L'iNTERDICTION D'EN TIRER PROFIT (ISSOUR ANAA)

Il est clair que le détenteur d'un de ces instruments financiers ne possède rien d'autre qu'un pari sur leur valeur.

Ici aussi on pourrait prétendre que s'il est vrai que le 'hamets n'appartient pas à l'actionnaire, l'actionnaire en tire toutefois certainement bénéfice. Dans le cas d'une brasserie ou d'une boulangerie, le 'hamets est la source essentielle de profits. (Nous pourrions être indulgents en ce qui concerne le bénéfice dans le cas de la cafétéria d'une société ou dans des situations analogues, mais cela poserait néanmoins problème au niveau de l'interdiction de posséder).

Cependant, il semble que cela non plus ne soit cause d'aucune rigueur. Si l'actionnaire ne possède pas le 'hamets, cela signifie que l'évolution des cours de ses actions n'est pas due au 'hamets lui-même mais aux changements intervenus dans son prix. Nous pourrions comparer ce cas à celui de quelqu'un qui possède une option pour acheter des titres ou pour réaliser l'achat à terme d'une matière première. La valeur de l'option ou le cours à terme est directement fonction du prix de la société ou de la matière première, mais il est clair que le détenteur d'un de ces instruments financiers ne possède rien d'autre qu'un pari sur leur valeur.

Nous pourrions objecter que nous nous exposons néanmoins dans ce cas à l'interdiction d'origine rabbinique de rotsé beqiyoummo - le désir du maintien du 'hamets. Certains Richonim l'interdisent, et le Choul'hane 'arou'h semble statuer comme eux (voir Choul'hane 'arou'h - Ora'h 'hayim 450, 7 et Michna beroura ad loc.). Cependant, cette interdiction n'est violée que lorsque le bénéfice provient directement du 'hamets, et non quand le 'hamets aidera indirectement à se faire rembourser un prêt (Ora'h 'hayim 441, 2), ou à donner en location son animal de trait (Ora'h 'hayim 450, 7).
Il semble qu'en ce qui concerne cette interdiction le bénéfice tiré du 'hamets doive être tout à fait direct.
 

LE 'HAMETS APRèS PESSA'H

Selon le point de vue qui considère les parts de société comme une créance, si l'actionnaire vend les siennes, il peut utiliser son propre 'hamets.

Comme nous l'avons mentionné, il devient interdit après Pessa'h de tirer profit du 'hamets qui a appartenu à un Juif pendant la fête. Cela peut-il poser un problème aux actionnaires ?

Bien entendu, le 'hamets après Pessa'h ne pose pas plus de problèmes que le 'hamets pendant Pessa'h, et si une action dans une société n'est pas considérée comme un titre de propriété du 'hamets, il n'y a aucun problème. Il semble aussi que, selon le point de vue qui considère les parts de société comme une créance, si l'actionnaire vend les siennes comme expliqué ci-dessus, il peut utiliser son propre 'hamets, puisqu'il avait appartenu à un non-Juif pendant Pessa'h.

Un problème survient pour celui qui considère la possession de parts de société comme une association, dans le cas où leur propriétaire a négligé de les vendre avant Pessa'h, ou s'il désire en acheter après Pessa'h auprès d'un Juif qui aura omis de les vendre.

Il existe dans ce cas deux raisons d'opter pour la souplesse. En premier lieu, les diverses indulgences s'appliquent à toute interdiction d'origine rabbinique (miderabbanane). En ce qui concerne ces interdictions, nous pouvons appliquer le principe de bereira (" imputation "). S'il y a beaucoup d'actionnaires non juifs et beaucoup d'actifs qui ne sont pas 'hamets, nous pouvons attribuer le 'hamets aux non- Juifs et les autres actifs aux Juifs. Plusieurs autorités ont écrit à ce sujet que nous pouvons, dans un tel cas, nous appuyer sur l'invalidation du 'hamets interdit si c'est celui qui appartient à la minorité. (Voir Melamed LeHoïl 91 au nom du Rabbin Hildesheimer).

En outre, cette interdiction particulière est un kenass (" amende "). Puisque nous n'infligeons pas une amende, en règle habituelle, quand le coupable peut s'appuyer sur une opinion faisant autorité, il semble que les opinions indulgentes sont suffisantes pour empêcher ce problème, même pour quelqu'un qui ne s'appuie pas sur elles pour l'interdiction, beaucoup plus sévère, de la possession de 'hamets pendant Pessa'h.
 

CONCLUSION

En ce qui concerne le 'hamets à Pessa'h, les autorités hala'hiques suivent plus ou moins leurs opinions fondamentales en ce qui concerne la manière de considérer la possession de parts de sociétés en général.

Celles qui perçoivent l'actionnaire comme un simple créancier sont indulgentes, et elles ne se sentent pas concernées par des interdictions secondaires comme celles qui condamnent le profit tiré du 'hamets (issour hanaa) ou le " désir de son maintien " (rotsé beqiyoummo).

Quant à celles qui en font un associé au sens plein du terme, elles interdisent la possession de parts dans les sociétés qui possèdent du 'hamets pendant Pessa'h, mais il semble que l'on puisse permettre d'inclure ces titres dans notre vente habituelle de 'hamets, et qu'il soit prudent de le faire.
 

Traduction et adaptation de Jacques KOHN


A PROPOS DE L'AUTEUR
le Rabbin Asher MEIR
Le rabbin Asher MEIR a reçu un diplôme de Ph.D. en Economie au Massachusetts Institute of Technology, ainsi que l'ordination rabbinique en Israël après avoir étudié pendant douze ans dans des yechivoth. Il dirige le Jewish Business Response Forum, au JCT Center for Business Ethics, et il enseigne les sciences économiques au Jerusalem College of Technology. Avant son installation en Israël, il a travaillé comme conseiller économique auprès de l'administration Reagan. Il a publié plusieurs articles sur des sujets relatifs au commerce et à l'économie modernes et sur la loi juive.
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