Comme il est difficile d’écrire, alors que la souffrance nous étreint tous face au drame qui nous touche tous, les membres du Klal Israel (communauté juive)!
Avant de se confronter aux questions sans réponses, essayons de nous laisser interpeller par le message que nous devons essayer de prendre.
Des enfants, purs, sans taches, un papa venu en France pour transmettre la Thora aux jeunes d’une communauté...
Ne parlons pas de punition …
Ne nous mettons pas à la place de D.ieu...
Essayons, maintenant que cet événement tragique est là, de savoir comment, pardonnez-moi ce mot, « l’utiliser » pour qu’à travers leurs disparitions ces âmes pures puissent encore nous apporter quelque chose.
Le Klal Israel « sait » que quand les événements arrivent il faut se remettre en cause.
Tous.
Sans exceptions.
Chacun « sait » sur quoi il doit progresser, changer, évoluer, grandir
Que cela soit dans le rapport à D.ieu ou le rapport à l’autre.
Sachons être grand et donner les plus grands mérites pour ceux qui ne sont plus.
Qu’à travers leur disparition tragique nous puissions changer en profondeur, ne pas nous satisfaire juste de quelques gestes pour évacuer notre douleur, mais bien leur offrir le plus beau cadeau qu’il soit: qu’ils puissent êtres à l’origine d’une transformation réelle et durable chez nous tous.
« Dodi yarad legano lilkot ben hachochanim » : « mon bien aimé est descendu dans son jardin pour cueillir parmi les roses ». (Cantique des cantiques)
Un papa accompagné de ses deux fils, une petite fille souriante se rendant à l’école, des roses pures, sans tache, sont montées aux cieux, assassinés !
Les pleurs, les cris, les analyses politiques ne les feront pas revenir à la vie mais une question lancinante reste : POURQUOI ?
Pourquoi des enfants, pourquoi ce père de famille venu en France pour y enseigner la Thora ont-ils disparus de manière aussi cruelle ?
Cette question, vous me direz, n’est pas nouvelle ; malheureusement elle a été présente dans toutes les générations. Pourquoi ces souffrances ?
Le Midrash raconte que lorsque Moïse notre Maître reçut la Torah au Sinaï, il demanda à D.ieu de lui montrer qui seraient les Maîtres du peuple d’Israël dans l’histoire. Il vit Rabbi Akiba et en entendant son enseignement, il perçut la dimension exceptionnelle de ce Maître. Il demanda alors à D.ieu de lui montrer comment ce Maître allait mourir.
En voyant Rabbi Akiba souffrir atrocement mais dans un état de sérénité parfaite, sous la torture infligée par les romains, Moïse interpella D.ieu en lui demandant « zou Torah vezou sekhara ? » « Une telle grandeur dans la Torah et une telle récompense ? » et D.ieu de lui répondre : « Chetok !» : « Tais toi et si tu continues à parler, je ramène l’univers à son état originel ! ».
Dans sa réponse, D.ieu nous apprend que l’humain va devoir vivre avec une question sans réponse, car dans l’univers dans lequel nous nous trouvons, il nous manque les éléments nécessaires pour appréhender le sens du projet de D.ieu.
Toujours selon le Midrash, Abraham, allant sacrifier Isaac, rencontre sur son chemin, une rivière profonde. N’arrivant pas à la traverser, manquant s’y noyer, il demande à D.ieu d’intervenir afin de l’aider à continuer son chemin, et la rivière disparaît.
La rivière profonde dans la symbolique de la Kabbale représente l’intellect ; face au sacrifice d’Isaac, le problème ultime d’Abraam, c’est la contradiction de D.ieu qui lui a garanti une postérité à travers Isaac, l’incompréhension de D.ieu qui lui demande de tuer ; alors Abraham demande à D.ieu de lui donner la force de continuer malgré cette incompréhension.
Dans un texte célèbre, « Le testament de Bétsalel Rakover », un juif du ghetto de Varsovie exprime toute sa souffrance et sa révolte face aux destructions et à l’horreur ; mais la conclusion bouleversante de sa lettre résume au fond toute la force immense qui a permis au peuple d’Israël de se maintenir dans l’histoire. Voici ses mots : « Mais D.ieu, saches que tout t’appartient, absolument tout, sauf une chose : la liberté que nous avons de vouloir continuer à croire en toi ».
Lorsqu’à Auschwitz, le Rabbi de Bluzhev alluma un soir des bougies de Hanoucca en présence de dizaines de déportés, un juif l’interpella :
« Rabbi, je veux bien que vous prononciez les bénédictions sur l’allumage de ces bougies de Hanoucca mais comment pouvez-vous dire « Béni sois tu Eternel qui nous a fait vivre, qui nous a maintenu et qui nous a fait arriver à ce jour là » ?! Remercier D.ieu d’être ici ?! »
« Tu as raison » dit le Rabbi, « j’ai eu la même question que toi. Je remercie D.ieu de m’avoir permis de voir des dizaines de juifs qui avaient toutes les raisons du monde de ne pas été présents maintenant à prononcer ces prières et qui malgré tout ont décidé d’être là ! Merci à D.ieu de m’avoir permis de voir la puissance de la foi juive qui assure l’éternité d’Israël »
Sachons être ensembles, unis, proches les uns des autres, sans nous poser la question de l’appartenance que peut avoir autrui à notre mode de pensée ; nous sommes tous des descendants de Abraham, de Isaac et de Jacob, maillons d’une chaîne indestructible…
Puisse D.ieu amener rapidement la paix et la consolation. Amen